MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE 1

0940
1686
1782

Titre(s)

Mercure historique et politique concernant l'état présent de l'Europe, ce qui se passe dans toutes les Cours, l'intérêt des Princes, leurs brigues, et généralement tout ce qu'il y a de curieux pour le mois de Novembre 1686, le tout accompagné de Réflexions politiques sur chaque Etat.

Dans certaines collections, pour janvier 1689 (t. 6), on trouve : Mémoire de ce qui se passe de plus considérable dans toutes les Cours de l'Europe, le tout accompagné de réflexions, et l'éditeur n'est pas Van Bulderen, mais «Jean Hamel, à Cologne». Tout rentre dans l'ordre en février.

De même parfois, le t. 13 porte d'abord, comme page de titre, Lettres historiques, contenant ce qui se passe de plus important en Europe, et les Réflexions nécessaires sur ce sujet, Tome II, Mois de Juillet 1692 ; A La Haye, chez Adrien Moetjens. Comme ces Lettres historiques existent par ailleurs, mais que leur éditeur n'est pas le même que celui du Mercure, cela pose un curieux problème technique. En août, on revient au Mercure et à l'éditeur Van Bulderen. En septembre, à nouveau les Lettres historiques et Moetjens. Tout rentre dans l'ordre à partir d'octobre, mais ces «Lettres historiques» réapparaissent bizarrement dans le t. 15 entre les mois de juillet et d'août 1693, avec une pagination surnuméraire.

De janvier 1733 à décembre 1744, dans le titre initial (ci-dessus), suppression de «leurs brigues» et de «généralement tout».

De janvier à mai 1781, le titre est Mercure historique, politique et littéraire. On retrouve le titre initial à partir de juin 1781.

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

Novembre 1686 – avril 1782. Nombre total de volumes : 192. Privilège : le nom de l'éditeur étant initialement fictif, le privilège «des Etats de Hollande et de Westfrise» n'apparaît qu'en mars 1688. Périodicité : elle est indiquée par l'Avertissement qui précède le mois de juillet 1688 : «tous les premiers jours de chaque mois».

Description de la collection

On enregistre parfois un certain flottement pour la coïncidence entre volumes et tomes (il arrive qu'il y ait 3 ou 4 volumes par an), et aussi d'une collection à l'autre, mais d'une manière générale, il y a deux volumes par an, couvrant chacun six mois.

Chaque volume compte entre 650 et 700 p. (sauf le dernier : 480 p.) en format in-12.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

Nov. 1686 – févr. 1688 : «A Parme, chez Juan Batanar», libraire fictif, qui cache Van Bulderen (ci-après). Mars 1688 -déc. 1715 : Henry Van Bulderen, «Marchand libraire dans le Pooten, à l'enseigne de Mézerai», à La Haye. Janv. 1716 -sept. 1719 : les frères Louis et Henri Van Dole, marchands libraires à La Haye. Oct. 1719 – déc. 1723 : Henri Van Dole seul. Janv. 1724 – déc. 1725 : veuve Henri Van Dole. Janv. 1726 – juin 1741 : Henri Scheurleer, libraire à La Haye. Juil. 1741 – juil. 1761 : Frédéric-Henri Scheurleer, fils du précédent. A partir de novembre 1755, il est précisé : «Libraire proche la Cour, sur le coin du Cingel». Puis, en mars 1761, le libraire annonce qu'il «vient de changer de maison, et qu'il a fixé sa demeure dans le second Wagestraat, la septième maison du Pont du Burgwal». Remarque : en août 1758, on apprend que le libraire a, depuis novembre 1756, deux imprimeurs suisses associés, qui d'ailleurs ne le paient pas. Août 1761 – janv. 1762 : la veuve de Frédéric-Henri Scheurleer. Févr. 1762 – déc. 1762 : C.G.B. Hoffman et Compagnie, «au Voorbout près du Vossen-Tuintje», à La Haye. De janvier à mars 1763 : la page de titre ne porte pas d'adresse. Avril 1763 : «A La Haye, chez Hoffman et Staatman, libraires sur le Kalvermarkt, proche le Maréchal de Turenne». Mai 1763 – déc. 1770 : Frédéric Staatman, même adresse. Janv. 1771 – sept. 1775 : Henry Backhuysen et Frédéric Staatman, libraires, ces deux noms figurant d'abord dans cet ordre, puis dans l'ordre inverse. Oct. 1775 – oct. 1780 : on retrouve Frédéric Staatman seul, à la même adresse. Nov. 1780 – avril 1782 : veuve Staatman.

Le libraire indique de temps en temps les endroits où l'on trouve le Mercure. Par exemple, en décembre 1704, c'est à Maestricht chez de L'Essaert, à Liège chez la veuve de Théodore Delmer, à Düsseldorf chez Christian Sluyter et à Cologne chez Philippe Ponet ; en mai 1763, il est signalé que «le véritable Mercure de Hollande ne se distribue en France qu'à Sedan chez les frères Jacquemare, libraires, sur la place près le marché ; en Flandre, Lille, Jacquez, libraire, en Braband, Gand, Sommers, libraires» ; en août 1772, le Mercure, qui «paraît régulièrement et sans retard le 1er de chaque mois» au prix de 4 s. par mois pour La Haye, est distribué à «La Haye, Amsterdam, Leyde, Rotterdam, Utrecht, Dort, Middelburg, Liège, Lille, Gand, Anvers, Hanovre, Hambourg, Varsovie, Vienne, et aux bureaux des Postes dans les principales villes, et particulièrement Londres, Paris, Bruxelles, Lille, Béthune, Tournai, Gand, Louvain, Maseyk, Emmeric, Munster, Cologne, Francfort et ailleurs». Le prix de la collection complète est par exemple de 140 florins de Hollande pour 117 volumes en 1745, de 160 florins pour 130 volumes en 1751.

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

Auteurs : on trouvera toutes les explications utiles sur cette importante question dans un article de Jean Lombard (cf. Bibliographie). Ne figurent ici que les résultats de cette recherche, les points d'interrogation signifiant une ignorance ou une incertitude soit sur la période, soit sur l'auteur, soit sur les deux ; un point d'interrogation entre parenthèses signifie une certitude sur le nom de l'auteur, mais une incertitude sur son identification exacte. Nov. 1686 – avril 1693 : Gatien de COURTILZ DE SANDRAS, fondateur du journal. Avril 1693 – juil. 1710 : LA BRUNE ( ?). Août 1710 – déc. 1715 ? ; SAINT-ÉLIER ?. Janv. 1716 ? – sept. 1722 : SAINT-BONNET ?. Oct. 1722 – juil. 1724 : GUYOT ( ?). Août 1724 – déc. 1750 : ROUSSET. Janv. 1751 – déc. 1779 : ?. Janv. 1780 – déc. 1780 : ?. Janv. 1781 – avril 1782 : Guillaume-René Le Fébure de Saint-Ildephont LE FÉBURE.

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

Dans l'Avis au Lecteur du premier numéro, Courtilz annonce son intention de présenter les nouvelles utiles pour «l'Histoire», en respectant «la vérité». Il ajoute : «Au reste, je parlerai des gens de qualité avec quelque sorte de connaissance ; j'ai été dans plusieurs Cours où j'ai eu quelques habitudes avec eux. Je voudrais bien pouvoir dire la même chose du Cabinet des Princes, cela me ferait espérer de contenter le lecteur dans les Réflexions politiques que je prétends mettre à la tête de cet ouvrage sur l'état général des affaires de l'Europe, et à la fin des Nouvelles de chaque pays. A ce défaut j'y suppléerai par quelque connaissance que j'ai des affaires du monde, et si je suis si malheureux que de n'y pas réussir, ce ne sera pas ma faute». Dans l'exposé préliminaire des nouvelles de 1686, il déclare qu'il rangera les pays selon un certain ordre, mais qu'il pourra en changer si les lecteurs le demandent. Il ajoute : «Je ne parlerai pas de l'état où se trouvent les Princes plus éloignés ; nous prenons trop peu de part à ce qui les regarde pour nous en embarrasser ; d'ailleurs, les nouvelles qui viennent de ces pays-là sont si vieilles, et d'ailleurs si sujettes à caution, que ce serait merveille qu'elles arrivassent jusques à nous saines et sauves». En janvier 1687, Courtilz annonce qu'il rangera désormais les Etats selon leurs «prérogatives», c'est-à-dire : Rome (et Italie), Allemagne (et Turquie), France, Espagne, Angleterre, Pologne, Suède et Danemark, Venise, Hollande, Cologne. Pour le fond, il déclare en mars 1687 : «Mon dessein est de parler des choses selon les différents événements, et non pas de m'assujettir à suivre toujours les mêmes maximes».

Ce programme (nouvelles historiques, réflexions politiques, dans l'impartialité) sera repris par les successeurs de Courtilz, qui, souvent, commenceront également l'année par une rétrospective. Ainsi, l'auteur de janvier 1717 écrit : «L'ordre et la méthode de ce Journal nous engageant depuis son établissement à ne point commencer une nouvelle année sans donner un précis des principaux événements de la précédente, nous essaierons de nous acquitter ici de ce devoir, en rapportant ceux de l'année 1716, de manière à en rappeler les idées assez distinctes, sans trop occuper néanmoins de l'espace destiné aux nouvelles de ce mois et à la quantité de longues pièces qui nous restent à insérer dans la capacité d'un si petit volume». En janvier 1726, le libraire avise «qu'il continuera d'imprimer chaque mois et de débiter ledit Mercure, qu'on rendra le plus intéressant qu'il sera possible sans choquer aucune Puissance ni aucune Religion». En janvier 1732, Rousset écrit que les rédacteurs qui ont succédé à Courtilz «ont assez suivi l'esprit du fondateur», et qu'il veut agir de même : «C'est pourquoi je prie Mrs les Ministres, et autres Politiques, de m'adresser les Mémoires, Actes, Lettres, Relations de faits, etc., qu'ils souhaiteront rendre publics ; j'en ferai un usage fidèle avec reconnaissance et suivant les ordres qu'ils voudront bien me prescrire». Et encore au début de 1750, Rousset affirme son désir de rester fidèle à la méthode et à l'esprit du fondateur du journal.

En décembre 1780, un Prospectus annonce les intentions du nouvel auteur : «M. Le Fébure continuera, comme ci-devant, à faire connaître l'état de l'Europe et les intérêts des différentes Puissances, il conservera à la curiosité et l'utilité des Lecteurs les pièces qui doivent servir à l'Histoire et l'instruction de la postérité. Mais, or ça, ce Journal ne sera plus une copie servile des gazettes. Il distraira le lecteur par des morceaux de littérature, et il insérera dans son journal, généralement, tout ce qu'il croira capable de l'intéresser et de faire fuir la monotonie». Mais Le Fébure, à la demande de ses lecteurs, renoncera à ce programme dès avril 1781.

La succession des nouvelles et des réflexions par Etats est en principe respectée. Mais il arrive que les nouvelles de tel Etat, ou les réflexions, soient supprimées par manque d'informations ou de place. Certains successeurs de Courtilz supprimeront systématiquement les réflexions par Etats.

On trouvera assez souvent, en janvier, un Avant- Propos présentant un «Abrégé» ou une «Récapitulation» des nouvelles de l'année précédente.

Aux nouvelles proprement «historiques» s'ajoutent généralement des informations variées (vie sociale et culturelle, état-civil, faits divers, curiosités). Seul Le Fébure essaiera, en 1781, de modifier le caractère du journal en y faisant figurer des rubriques telles que «Littérature», «Découverte», «Usage ancien», «Anecdote», mais sans succès.

D'une manière générale, les Etats sont rangés dans l'ordre indiqué par Courtilz en janvier 1687, mais cette liste est assez souvent modifiée pour des raisons diverses, parfois fournies par les auteurs.

L'art du journalisme. Au fil de sa longue existence, le Mercure fournit, à la faveur de remarques et d'avis divers, de nombreuses indications qui permettent de dégager une déontologie de la presse et de relever les éléments de toute une technique journalistique.

Sur le plan des principes, les auteurs s'affirment d'autant plus scrupuleux qu'ils se savent tributaires de lecteurs avertis et exigeants ; en août 1688, Courtilz déclare même savoir de bonne part que Louis XIV lit son journal. D'où la prise en considération des désirs du public : «c'est pour lui que nous écrivons, et non pas pour nous», déclare Courtilz en janvier 1687 ; c'est pourquoi, sur sa demande, il donnera plus de nouvelles, et moins de réflexions. De même, en avril 1781, Le Fébure écrit qu'il obéira à ses lecteurs, dont plusieurs l'ont «fait prier de restreindre la partie littéraire, pour donner plus d'étendue à la politique».

Toutefois, le souci constant des auteurs, c'est la vérité. Certes, Courtilz remarque, en juin 1691, que l'on peut très bien rapporter des nouvelles fausses : «Que si on me demande pourquoi je les rapporte, puisque je ne les crois point, je répondrai que c'est parce qu'il est souvent aussi nécessaire de savoir ce qui se dit que ce qui est vrai, pourvu qu'on sache bien distinguer ces deux choses ; surtout lorsqu'on peut savoir que ces nouvelles sont avancées par ceux qui gouvernent. Un habile homme peut tirer de là des conjectures pour connaître ce qui se passe effectivement, et surtout les dispositions des Puissances qui font répandre ces bruits».

Mais il est primordial de procurer des informations sûres. Pour cela, il ne faut pas hésiter à attendre confirmation en cas de nouvelle douteuse, ni à se rectifier soi-même si on s'est laissé abuser. Courtilz ne néglige pas les détails : en juillet 1689, il demande à ses correspondants de lui écrire les nombres en lettres, et non en chiffres.

Quant à la nécessité de l'impartialité, elle est naturellement rappelée sans cesse. Mais, à en juger par les réactions des lecteurs, elle n'est pas toujours facile à observer. Rousset, en novembre 1738, déplore la difficulté du métier : «Les uns se plaignent lorsque les nouvelles ne sont pas accompagnées de réflexions ; d'autres voudraient qu'on ne leur racontât les faits que nûment et simplement ; d'autres enfin voudraient des réflexions, mais suivant leurs idées. La Religion s'en mêle même ; les uns voudraient que je fusse Janséniste, et d'autres, qu'emporté par le torrent, je ne pensasse qu'en Moliniste. Comment faire ?». Courtilz résout le problème en adoptant successivement les points de vue des différentes puissances : «Voilà de quelle manière nous devons expliquer les choses, c'est-à-dire en les tournant toujours en bonne part» (déc. 1686). Au contraire, Rousset lui-même opte pour une impartialité mitigée : en janvier 1749, il déclare que, maintenant que la paix est rétablie, il va pouvoir abandonner «cette espèce de partialité indispensable, et même de devoir pour tout écrivain public» envers sa patrie, la République de Hollande. «Au reste, ajoute-t-il, nous promettons à nos lecteurs de rester dans de justes bornes par rapport aux affaires de Religion et d'avoir le plus profond respect pour les Souverains, suivant la maxime anglaise que le Roi ne peut faire de fautes».

Pour les rapports avec les autres journaux, les attitudes sont variées. Le Mercure n'hésite pas à saluer l'apparition de nouveaux confrères. Courtilz manifeste son intérêt pour le Journal des savants (déc. 1687). La Brune ne tarit pas d'éloges sur Du Breuil et fait de nombreux emprunts à ses Nouvelles extraordinaires. Mais plus souvent, c'est la critique ou l'hostilité qui dominent. La victime constante est le Mercure galant, déclaré «fade» et d'une insupportable partialité en faveur de la France. Courtilz relève aussi des erreurs dans la Gazette d'Utrecht (janv. 1690), mais s'en prend surtout avec acrimonie à Le Noble, qui le lui rend bien (mars et oct. 1691). La Brune critique le Gazetier d'Anvers, qui «n'est qu'un impudent et un faquin» (sept. 1702). En novembre 1729, le libraire Henri Scheurleer fait état d'un arrêt de justice rendu en sa faveur contre un confrère, Jean Van Duren, auteur des Lettres sérieuses et badines. Quant à Rousset, dans un Avis au lecteur de 1743, il est fier de faire savoir que, grâce au nouveau journal d'un inconnu, intitulé Le Courrier véridique ou l'Anti-Rousset, il prend rang parmi les «Anti», avec Baillet, Machiavel, etc. Cet auteur reproche à Rousset d'être trop favorable à la Maison d'Autriche, aux dépens de la France. «Il promet que son Courrier sera l'antipode de mon Mercure. Voilà le Français, voilà cet esprit tyrannique qui veut que chacun pense comme lui». Pour le fonctionnement du journal, les auteurs ont recours à des réseaux de correspondants ou d'amis dans tous les pays ; on apprend ainsi qu'en 1780, «M. Catien, libraire à Rouen, tient la correspondance de France». Il y a aussi des informateurs intéressés ; Van Bulderen les avertit en mars 1689 : inutile de lui envoyer «de certains libelles contre le gouvernement d'Angleterre et contre celui des Provinces Unies», car il ne les publiera pas. De son côté, Rousset, en mai 1735, se plaint de ce que certains s'amusent à lui faire parvenir des fausses nouvelles, qu'il est ensuite obligé de démentir. Quant aux personnes «qui envoyeront des Mémoires à l'Auteur du Mercure, pour les y mettre», elles sont priées d'affranchir leurs lettres, sinon on les refusera (mars 1700).

Les illustrations sont très rares ; on ne trouve guère que quelques plans et croquis à caractère scientifique. Mais le Mercure connaît les nouvelles de dernière heure, et aussi les petites annonces, par exemple, en octobre 1763, celle qui signale l'existence à Sedan, chez les frères Jacquemart, libraires, d'«un très curieux Cabinet littéraire pour la lecture des Nouvelles en tout genre, des Gazettes de France, d'Hollande, Etrangères, Journaux, Mercures et autres ouvrages périodiques, à des conditions très favorables, pour commencer le 7 du mois prochain, et dont l'Avis se distribue chez eux gratis».

La vérification des informations est un point important, car c'est le libraire qui est responsable de ce qui est écrit dans le journal, et c'est à lui que les lecteurs mécontents adressent leurs reproches. Ainsi, en janvier 1769, F. Staatman fait savoir qu'il a reçu de l'Académie française l'injonction de publier un certificat montrant la fausseté de ce que le Mercure de novembre 1768 avait dit de certains académiciens, en particulier de l'abbé d'Olivet ; Staatman veut d'abord se renseigner auprès de sa source ; et en février il publie le certificat en question, mais en se disculpant : il a tiré son anecdote du Courrier du Bas-Rhin. Pour plus de sûreté, le libraire exerce généralement un contrôle sur son rédacteur. C'est ce que n'a pas fait Van Bulderen, obligé de s'excuser, en septembre 1688, pour 14 p. virulentes contre la Papauté parues en août alors qu'il était absent, ce qui a entraîné l'interdiction du Mercure «à Liège et dans tout le Pays-Bas espagnol» ; pour cette fois il essaie de disculper aussi Courtilz en prétendant que c'est «quelque malintentionné» qui lui a fourni de mauvais mémoires, mais il ne se laissera plus surprendre. D'ailleurs, pour échapper aux critiques, le Mercure, à toutes les périodes, reproduit de très nombreux textes, longs parfois de plusieurs dizaines de pages, sans les commenter.

Enfin, le Mercure assure sa propre publicité ; ainsi, en septembre 1774, on lit : «Le public éclairé est convaincu que ce Journal, établi depuis presque un siècle, l'emporte de beaucoup sur toutes ces petites productions nouvelles en ce genre, nonobstant leurs titres fastueux, alambiqués, et renchérissant les uns sur les autres. Ceux qui veulent se procurer un corps complet de Politique et d'Histoire, depuis un siècle, trouveront, dans ce Journal, ce qu'ils ne chercheraient qu'avec beaucoup de peine dans d'autres livres plus coûteux et moins véridiques». Régulièrement paraît aussi la liste des livres nouveaux que l'on peut trouver chez l'éditeur du Mercure. Quant aux auteurs, certains d'entre eux, tels Courtilz et Rousset, ne dédaignent pas de faire indirectement, dans le journal, de la réclame pour leurs propres ouvrages.

L'intérêt documentaire. C'est naturellement l'essentiel, mais, comme il s'agit de près d'un siècle d'Histoire, il n'est pas possible d'entrer dans les détails, ni d'être complet.

Evénements politiques : c'est l'aspect le plus important, comme le laisse prévoir le titre, mais aussi peut-être celui sur lequel il est le moins utile de s'étendre ici. On trouve dans le Mercure tout ce qui concerne les alliances, les guerres et les traités de paix, la mort et l'avènement des souverains, en particulier des papes, avec les brigues des conclaves. Les affaires intérieures de chaque Etat, dans tous les domaines, sont exposées avec précision, et, à partir de 1781, Le Fébure y ajoute celles de l'Amérique.

Religion : elle occupe une place de choix, surtout en ce qui concerne la France. Questions traitées : les persécutions contre les protestants, avec les «dragonnades» et la révolte des Camisards dans les Cévennes (en août 1709, la Hollande offre «la naturalisation générale des protestants réfugiés») ; l'affaire du Quiétisme ; la lutte contre le Jansénisme et la querelle engendrée en France par la bulle Unigenitus ; la mise en cause des Jésuites dans la question des rites chinois.

Histoire des idées : on s'interroge sur les phénomènes d'apparence surnaturelle ; Courtilz croit qu'il y a truquage de la part d'Aimar, «le devin de Lyon», «l'homme à la baguette» (mars 1693) ; La Brune se montre sceptique sur le saint Suaire de Turin (mai 1697) et, en septembre 1698, pense que les faits de ce genre ont une explication naturelle, car on est maintenant, dit-il, dans un siècle «éclairé», où «les hommes sont devenus philosophes, ou pour mieux dire raisonnables» ; en novembre 1737, Rousset s'en prend au miracle de saint Janvier, à Naples.

On relate aussi quelques faits marquants à propos d'écrivains célèbres. En juin 1762, l'Emile de Rousseau est condamné à être brûlé, parce qu'y est défendue l'idée d'une religion naturelle, soumise à l'examen de la raison. En juin 1764, évocation de l'affaire Calas, avec référence au Traité sur la tolérance de Voltaire, et à ce sujet, éloge du «meilleur des Rois», mais condamnation du «zèle ignorant» et de la «haine pernicieuse» de quelques ecclésiastiques ; mais en 1760, rien sur l'affaire La Barre. En mai 1765, nouvelle de Russie, où l'impératrice va donner de grandes fêtes pour honorer, «en la personne du philosophe Diderot, chef des < nouveaux illuminés >, la philosophie et les lettres, utiles aux Etats, qu'elles éclairent et ornent, lorsqu'elles ne les corrompent pas».

Il arrive aussi que les auteurs du Mercure fassent eux-mêmes des professions de foi qui révèlent l'éclosion d'idées nouvelles.

Ainsi, l'inconnu qui succède à Rousset déclare, en janvier 1751 : «Nous nous proposons, avec l'aide de Dieu, d'écrire ce journal en vrai cosmopolite, ou en vrai philosophe» ; il se veut «simple habitant» de l'Europe. Il parle à plusieurs reprises de l'Europe en tant que telle, du point de vue politique et commercial, et réaffirme son cosmopolitisme en janvier 1772.

Une question importante est celle du développement de la franc-maçonnerie. La première mention qui en est faite date de mars 1738 : «Les Francs-Maçons, qu'on ne regarde pas en Lorraine comme ailleurs, ont donné à Lunéville une superbe fête, à l'occasion du Carnaval» (une page de description). En mai 1739, on lit, dans une note sur les francs-maçons, qui ont traversé Londres en cortège : «Cette Société, l'une des plus anciennes de l'Europe, y compris tous les Ordres de Chevalerie, augmente ici en nombre et en réputation, à proportion qu'elle est persécutée au dehors». On apprend, en avril 1776, que les assemblées de francs-maçons sont interdites dans le Royaume de Naples, mais, en juin, que les francs-maçons de Hambourg sont honorés de la visite du duc Ferdinand de Brunswick et du prince de Hesse-Cassel. En mai 1778, on annonce que Voltaire a été reçu franc-maçon dans la Loge des Neuf-Sœurs.

Faits de société : là encore, c'est surtout la France qui alimente l'information. Le journal semble se complaire à souligner, au fil des années, la misère du peuple, accablé d'impôts malgré la prospérité du royaume. La criminalité se développe. Des bandes de voleurs sévissent à Paris et en province, parfois par compagnies de plusieurs centaines d'individus (1714, 1718, 1775). Cartouche est exécuté en 1721. La disette et le chômage entraînent aussi des désordres. En mars 1699, des troubles sont causés à Lyon par «les ouvriers en soie, qui y manquent de travail». Encore à Lyon, en octobre 1709, on compte plus de 10 000 mendiants «par la cessation de travail», et 400 enfants «apportés dans les églises». Ce dernier phénomène est enregistré normalement dans les données de l'état-civil ; ainsi, en 1751, il y a eu à Paris 5013 mariages, 12 321 baptêmes, 16 673 enterrements et 3783 enfants trouvés.

Par nature, la presse rend plutôt compte de la malfaisance que des actes vertueux. Les corsaires défraient la chronique : de la Méditerranée ils étendent leur action jusqu'en Norvège (août 1687). En France, à l'image de la Loterie du Roi, des particuliers mettent sur pied des loteries privées, mais elles sont souvent truquées (avril 1687). En mars 1700, on peut lire le texte d'une lettre demandant aux magistrats de Liège de verser une rançon de 30 pistoles, sous peine de destruction de biens, et de mort s'ils viennent en armes au lieu indiqué.

Les procès ne sont pas oubliés et nous renseignent parfois sur l'histoire des institutions : en mars 1687, l'Université de Paris, qui veut défendre son monopole, intente une action judiciaire contre «plusieurs maîtres qui tiennent des écoles» ;   «l'instance est au Parlement, où si l'Université a le droit de son côté, les autres ont beaucoup d'amis. La plupart des Conseillers, qui savent ce que c'est que des collèges, où fort souvent la jeunesse se débauche, ont leurs enfants dans ces écoles, où l'on en a bien plus de soin ; ainsi l'on ne doute pas qu'ils ne soient portés à les conserver. D'ailleurs les Jésuites, qui ne sont pas des amis de l'Université, ne seront pas fâchés qu'on lui donne cette petite mortification, ce qui les pourrait bien faire agir sous main».

Faits divers : il s'agit surtout des tremblements de terre (Messine, mars 1693 ; Saint-Domingue, 1770), des éruptions du Vésuve, des grands incendies, des hivers terribles (févr. 1709), des invasions de loups (régions d'Orléans et de Tours en 1713 et 1714), sans compter quelques curiosités, comme les naissances de monstres ou les cas de longévité exceptionnelle.

L'orientation idéologique. Elle varie naturellement en fonction des auteurs et des époques, mais offre néanmoins quelques constantes. D'une manière générale, on critique la politique de Louis XIV et celle de Rome. On s'en prend surtout aux jésuites. On admire la Hollande et l'Angleterre. On met en avant la liberté, la tolérance et la raison. Mais on évite la polémique trop vive, le Mercure historique et politique se voulant impartial, objectif, mesuré et respectueux des Puissances.

Courtilz de Sandraz : pour les idées exprimées par cet auteur dans le Mercure, voir Jean Lombard, Courtilz de Sandras et la crise du roman à la fin du Grand Siècle, PUF, 1980, p. 351-355. Bornons-nous ici à dire que, contrairement à une opinion répandue, Courtilz ne se montre nullement partial en faveur de la France, ni systématiquement hostile à Rome. Ce qui le guide, c'est son opposition au machiavélisme et son adhésion aux principes de l'Evangile. Il prône le respect de la morale en politique. Il dénonce les persécutions contre les protestants. Sur le plan théorique, il fait l'éloge du parlementarisme anglais, mais sans mettre en cause le régime monarchique ; il trouve bien que les républiques ont plus de «douceur» que les monarchies, mais il les juge moins efficaces. En religion, son anticléricalisme le fait surtout se dresser contre les Jésuites et les moines. Il se prononce contre le célibat des prêtres. Globalement, ce Français, catholique, ancien mousquetaire et capitaine de cavalerie, reste assez conformiste.

La Brune est un calviniste. Il s'en prend presque autant aux luthériens qu'aux catholiques ; pour ces derniers, il critique en particulier la dévotion à la Vierge et l'attachement aux images pieuses. En politique, il est systématiquement favorable aux Hollandais et aux Anglais, et hostile à la France et à la Papauté. Annonçant en mai 1704 la mort de Bossuet, il trouve que celui-ci suivait trop la politique de Louis XIV. Au contraire, en février 1707, il fait l'éloge de Bayle.

Le successeur de La Brune est plus modéré, en politique comme en religion. Il conteste le principe de l'infaillibilité pontificale, mais sans marquer d'animosité à l'égard des papes.

L'auteur suivant revient à un ton plus polémique. Il fait l'éloge du Régent, surtout par opposition à Louis XIV. Il s'en prend sans cesse au pape, mais se montre également hostile à l'égard des Turcs, en tant qu'ils sont d'une religion non chrétienne, estimant qu'il faut s'opposer à l'impérialisme du «Croissant».

Quant à Guyot, il reste moins de deux ans au Mercure. Il essaie de garder une certaine mesure, se refusant par exemple à condamner le corps des Jésuites en bloc.

Et c'est la longue période (26 ans) marquée par la personnalité de Rousset. Protestant réfugié en Hollande, Rousset est évidemment hostile au catholicisme et à la politique française. Mais il fait surtout profession de tolérance et d'impartialité. C'est un «philosophe». Se demandant, en avril 1736, pourquoi les Etats sont maintenant moins soumis à la Papauté, il écrit : «La superstition et l'ignorance avaient établi cette aveugle soumission ; la Science et une Religion éclairée ont dissipé ces ténèbres». Et il précise, en septembre 1737, qu'il n'admet pas qu'une autorité ecclésiastique l'emporte sur un pouvoir politique temporel. «Je déteste partout la tyrannie et l'intolérance», dit-il encore (févr. 1737). C'est pourquoi il n'hésite pas à rendre hommage à la vertu d'un pape ou à l'esprit pacifique du cardinal Fleury. D'ailleurs, tout au moins dans le Mercure, il ne manifeste pas le caractère vindicatif et violent qu'on lui attribue en général. Il se montre surtout attaché à la liberté ; c'est ainsi qu'en juillet 1737, il rapporte avec sympathie les protestations suscitées en Angleterre par un bill destiné à «limiter la liberté du théâtre» ; on ne peut pas faire de «règlements ou contraintes générales sur des choses qui d'elles-mêmes n'ont rien de mauvais», sans attenter à «l'esprit de liberté».

Le successeur de Rousset reste au Mercure encore plus longtemps que ce dernier (29 ans), peut-être en raison de sa relative modération. A part quelques rares attaques contre les Jésuites (par exemple, en octobre 1757, à propos de la condamnation de Damiens : «une société religieuse qui semble, depuis plus d'un siècle, avoir pris la détestable tâche de justifier les forfaits les plus énormes et d'innocenter les plus grands scélérats»), il essaie de se montrer objectif. Ainsi, en août 1770, il proteste contre le clergé de France, qui s'en est pris à la «liberté effrénée» régnant en Angleterre ; mais en novembre 1771, dans les Nouvelles de Grande-Bretagne, il semble rectifier sa position : «S'il est un pays en Europe, où l'on fasse un plus grand abus de la liberté de la presse, c'est assurément celui-ci, qui, depuis quelque temps, semble être inondé d'écrits satiriques et de libelles diffamatoires, qui attaquent impunément, et souvent aussi injustement, les personnes les plus respectables de l'Etat». D'une manière générale, il apprécie la rigueur et la dignité. C'est ainsi qu'en juillet 1776 il critique Voltaire, «dictateur de la littérature française», pour «son inconstance et le peu de fonds qu'on peut faire sur les éloges qu'il prodigue». Quant à Beaumarchais (févr. 1780), «c'est un de ces enfants perdus que, selon les circonstances, on lâche en avant et qu'on désavoue, punit même, quand la mission fut indiscrète ou se trouve malheureuse». Se proclamant citoyen de l'Europe, notre auteur traite des différents Etats avec impartialité : comme il est question, en avril 1780, de démolir la Bastille pour procéder à des embellissements, il remarque que cela serait d'autant plus réalisable que sous le présent règne on pourrait aisément se passer de cette prison. Mais ce qui le caractérise surtout, c'est son esprit religieux, d'où son commentaire sur la condamnation par Rome de La Pucelle d'Orléans, en juillet 1757 : «ouvrage abominable [...], production dans laquelle tout ce que la Divinité a de plus auguste et les Mystères de la Religion de plus respectable, est profané avec une impiété et une indécence des plus criminelles ; ouvrage infernal, dans lequel l'auteur, pour donner carrière à sa malice, emploie les allusions les plus scandaleuses pour répandre son venin sur tout ce qu'il y a de plus élevé, soit pour le rang, soit pour la puissance ; ouvrage enfin où ni le diadème ni les dignités que donne la naissance, ou que procurent les services, ne sont à couvert des traits satiriques de son auteur, dont la plume sale, livrée à l'impureté et au blasphème, n'emprunte ses portraits odieux que des idées les plus obscènes et les plus horribles qu'a pu lui suggérer son cœur gâté et corrompu».

L'auteur suivant, également inconnu, se différencie nettement de tous ses prédécesseurs : violente attaque contre les Anglais en juillet 1780 («L'Anglais est un peuple qu'on ne pourra jamais réprimer, il faut le détruire, dévaster son île»), long plaidoyer en faveur des Jésuites en septembre, éloge appuyé de la France en octobre, ces prises de position expliquent sans doute qu'il n'ait passé qu'un an au Mercure.

Enfin Le Fébure, un médecin, ne se charge du journal, d'ailleurs agonisant, que pour rendre service à la veuve Staatman. Il ne manifeste aucune orientation idéologique particulière.

Tables : Elles sont toutes intégrées à la collection. En principe, on trouve une «table» ou «indice» des matières à la fin de chaque tome, et parfois, en plus, une table chaque mois.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

Il n'est pas prudent de se fier aux catalogues de certaines bibliothèques. On ne trouve dans aucune d'entre elles la collection complète des 192 volumes. Voici les principales : B.U. Leyde : 185 vol. (manquent 1-3 et 6-9) ; Ars. : 182 vol. (manquent 183-192) ; B.M. Lille : 183 vol. (manquent 184-192, et 178, 179, 181 et 183 sont incomplets) ; B.M. La Rochelle : 168 vol. (manquent 169-192 ; 46 et 168 sont incomplets) ; B.N.U. Strasbourg : 157 vol. (manquent 104-107, 122-123, 154-165, 176-192) ; Bibliothèque de la Société d'histoire du protestantisme français, Paris : 153 vol. (manquent 1-2, 156-192) ; B.V. Amsterdam : 129 vol. (manquent 130-192) ; B.N. : 126 vol. (manquent 86 et 128-192).

On trouve encore 98 vol. à l'Inst, 75 à Ste G., 72 à La Haye, 71 au Centre des Fontaines à Chantilly, 49 à Amiens, etc.

Bibliographie

B.H.C., H.P.G.;  G.H.;  D.P. art. «Courtilz», «Guyot», «La Brune», «Rousset».

Contrefaçons : A part deux cas, toutes les contrefaçons signalées dans le journal se situent entre 1743 et 1769. – Août 1696 : «Henry Van Bulderen avertit le public que Georges de Bakker, libraire à Bruxelles, fait tous les mois contrefaire le Mercure historique, où il ajoute ce qui lui monte à la tête, et en ôte très souvent ce qu'il y a de plus curieux». – Février 1701 : le Mercure de janvier a été contrefait par François Broncaert, libraire à Liège, qui en a retranché le texte du testament du roi d'Espagne. Van Bulderen écrit : «Je déclare que je désavoue ledit Mercure. On trouvera dorénavant le mien à Maestricht chez M. de Lessaert, et à Liège chez la veuve de Théodore Delmer. De plus, ledit Broncaert imprime actuellement toutes sortes de méchants livres, qui n'ont jamais été imprimés ici, et se sert de mon nom ou de celui de quelque autre libraire de Hollande». – Mai 1743 : une «contrefaction» est dénoncée par Rousset, et le libraire signale encore, en novembre, qu'elle est imprimée sur du papier «plus grossier et plus brun avec un caractère très usé qu'on a de la peine à lire». – Février 1745 : «F.-H. Scheurleer avertit le public qu'il ne reconnaît point d'autre Mercure historique et politique pour original et véritable que celui qui est marqué de sa signature tel que ci-bas». – Décembre 1745 : «F.-H. Scheurleer avertit le public qu'il fait fondre de nouveaux caractères pour l'impression de ce Journal, avec lesquels il commencera d'imprimer son Mercure pour le mois de Janvier 1746, ainsi que les suivants, afin qu'on en puisse encore distinguer plus facilement sa véritable et originale édition, de celle qu'on en contrefait dans les pays étrangers, laquelle est tout à fait tronquée et remplie de faussetés». – Janvier et février 1746 : Scheurleer se plaint toujours de contrefaçons. – Juillet 1757 : une contrefaçon est publiée «dans une ville d'Allemagne». – Mai 1763 : contrefaçon par «le Sieur Philipart, de Liège». – Février 1769 : F. Staatman signale deux contrefaçons du Mercure, l'une sous son propre nom, mais avec une pagination différente, l'autre à Genève, chez Pellet et fils.

Mentions dans la presse du temps : Bayle, Nouvelles de la République des Lettres, déc. 1686. Thomasius, Monats-gesprächen. Halle, 1690, I, f. 66-83. Le Noble, La Pierre de touche politique, en particulier sept., oct., nov. 1690 et mai 1691. Sallengre, Mémoires de littérature, La Haye, 1715. Niceron, Mémoires pour servir à l'histoire des hommes illustres dans la République des Lettres, Paris, 1727, t. II Bréquigny, Journal des savants, oct. 1760.

Lettres, articles, monographies et livres : lettre de Minutoli à Bayle, 8 sept. 1690 (Choix de la correspondance inédite de Pierre Bayle, éd. Gigas, Copenhague, 1890, p. 542) ; lettre de Bayle à M. Constant, 5 janv. 1691 (Lettres choisies de Bayle, Rotterdam, 1714, t. I, p. 299) ; lettre de Bayle à Minutoli, 6 oct. 1692 (ibid., t. II, p. 384) ; lettre de Bayle à Minutoli, 14 sept. 1693 (ibid., t. II, p. 440) ; – Bayle, Réponse aux questions d'un provincial,Rotterdam, 1704, t. I, p. 447. – Fevret de Fontette, rééd. de la Bibliothèque historique de la France du père Lelong, Paris, 1771, t. II, p. 626. – Meusel, Bibliotheca historica, Leipzig, 1782, t. I, p. 163. – Runge H., Courtilz de Sandras und die Anfänge des «Mercure historique et politique», Halle, 1887. – Bourgeois et André, Les Sources de l'Histoire de France, Paris, 1913-1935, 3e partie, t. IV, p. 44. – Woodbridge, Gatien de Courtilz, sieur du Verger, Baltimore et Paris, 1925. – Lombard J., Courtilz de Sandras et la crise du roman à la fin du Grand Siècle, PUF, 1980, p. 11-12, 88-89, 273-285, 347-357. – Lombard J., «Les rédacteurs du Mercure historique et politique de La Haye (La Haye, nov. 1686-avril 1782)», dans Langue, Littérature du XVIIe et du XVIIIe siècle, Paris, CDU-SEDES, 1989.

Historique

C'est Courtilz de Sandras qui fonde ce journal en novembre 1686, à l'adresse fictive de Juan Batanar, à Parme ; il s'agit en réalité de Henry Van Bulderen, libraire à La Haye, dans le Pooten dont le nom apparaît en février 1688. Courtilz déclare qu'il veut pallier l'insuffisance et la partialité du «Mercure de Paris», mais c'est surtout avec Le Noble qu'il entretiendra la polémique, tout en essayant de se montrer objectif et mesuré à l'égard de la France. Courtilz reste le rédacteur du Mercure, non pas jusqu'en mars 1689, comme on l'a longtemps répété à la suite de Runge, mais jusqu'en avril 1693, date à laquelle il est mis à la Bastille en raison de ses activités clandestines ; ce Français, ancien capitaine de cavalerie, passé en Hollande en 1683, se livre en effet au commerce de livres interdits, dont beaucoup d'ailleurs sont de sa propre plume, entre la Hollande et la France. D'autre part, contrairement à une affirmation souvent reprise, la participation de Bayle au Mercure en 1689 et 1690 est fort peu vraisemblable.

Le successeur de Courtilz de Sandras n'est pas, comme on le dit toujours, Rousset de Missy, alors âgé de 6 ans, mais un certain La Brune, dont l'identité exacte n'est pas facile à établir. C'est un calviniste né en France et passé en Hollande. Son orientation est nette : attitude favorable aux Anglais et aux Hollandais, hostilité à l'égard de la France et de la Papauté. Il reste au Mercure jusqu'en juillet 1710.

A partir du mois d'août 1710, le journal est rédigé par un auteur qui s'appelle peut-être Saint-Elier, mais dont on ne sait rien. Relativement modéré en politique comme en religion, il reste sans doute au Mercure jusqu'en décembre 1715.

En tout cas, en janvier 1716, changement de libraire : à Van Bulderen succèdent les frères Louis et Henri Van Dole. Et il est probable que les nouveaux propriétaires ont également engagé un autre rédacteur. Mais de celui-ci non plus on ne sait rien, si ce n'est qu'il se nomme peut-être Saint-Bonnet. Son ton est plus polémique (contre la France et Rome) que celui de son prédécesseur.

En octobre 1719, Henri Van Dole reste seul possesseur du Mercure. Il prend un nouveau rédacteur en octobre 1722, Guyot. Contrairement à ce qu'on dit généralement, il ne s'agit sans doute pas de Guyot de Merville, mais plutôt de son père, Edme Guyot. Quoi qu'il en soit, Henri Van Dole étant décédé, sa veuve, qui lui succède à partir de janvier 1724, congédie Guyot en juillet de la même année, «sur les plaintes qu'elle a reçues de divers endroits que son Mercure était rempli de choses peu convenables» (on ne voit d'ailleurs pas à quoi elle peut faire allusion). Elle le remplace par «un autre auteur très capable, qui remettra le Mercure sur l'ancien pied» : il s'agit de Rousset.

Rousset va rédiger le journal à partir d'août 1724 jusqu'en décembre 1750, et verra, pendant cette longue période, trois libraires se succéder à la tête du Mercure. En effet, en décembre 1725, «la veuve de H. Van Dole ayant résolu de quitter le commerce» vend le journal à Henri Scheurleer, également libraire à La Haye, qui le cède à son tour à son fils Frédéric-Henri en juillet 1741. Rousset jouit d'une notoriété internationale : il est «membre des Académies des Sciences de Pétersbourg et de Berlin». Protestant réfugié en Hollande, il est naturellement hostile à la France et au catholicisme, mais sans manifester, du moins dans le Mercure, la violence dont on le taxe habituellement.

En janvier 1751, sans qu'on en sache la raison, Rousset quitte le journal. Il est remplacé par un nouvel auteur qui, d'entrée, déclare qu'il veillera soigneusement à ce qu'on ne puisse l'identifier. Il y réussit fort bien, grâce en particulier à la neutralité de ses idées, et c'est dommage, car c'est lui qui restera le plus longtemps au Mercure : jusqu'en décembre 1779. En novembre 1755, on apprend que le libraire F.-H. Scheurleer est installé sur le Cingel ; en mars 1761, il change d'adresse et se fixe «dans le second Wagestraat». Mais en août de la même année, il meurt subitement d'une apoplexie ; c'est sa veuve qui lui succède, pour peu de temps d'ailleurs, car il est annoncé, en février 1762, qu'elle a vendu le Mercure et tout le reste de son fonds à Hoffman et Compagnie, toujours à La Haye, «au Voorbout près du Vossen-Tuintje». En avril 1763, apparaît le nom d'un associé : «Hoffman et Staatman» sont installés sur le Kalvermarkt, nouvelle et dernière adresse du Mercure. Le mois suivant, le nom de Hoffman disparaît. En novembre et décembre 1770, une annonce fait savoir que «Henry Backhuysen et Frederik Staatman sont devenus propriétaires de tout le fonds du Journal, universellement connu, intitulé Mercure historique et politique», et ce sont ces deux noms qui apparaissent sur la page de titre à partir de janvier 1771 ; mais en octobre 1775, F. Staatman reste seul.

Un nouvel auteur arrive au Mercure en janvier 1780, mais ses idées sont trop différentes de celles de ses prédécesseurs (hostilité à l'égard de l'Angleterre, éloge de la France et des Jésuites), de sorte que la veuve de F. Staatman, qui succède à son mari à la tête du journal en novembre, cherche un autre rédacteur plus conforme aux habitudes de ses lecteurs.

Elle croit le trouver en la personne de Le Fébure de Saint-Ildephont, un ami de son mari, qui prend en charge le Mercure à partir de janvier 1781. Mais Le Fébure, qui est médecin, n'a accepté que pour «obliger une veuve chargée d'enfants» ; il n'a guère de temps à consacrer à son nouveau métier ; en février et mars, il doit s'excuser pour les nombreuses fautes que le correcteur laisse passer. En outre, il a voulu donner un objet supplémentaire au journal, qui est devenu le Mercure historique, politique et littéraire. Mais les lecteurs protestent, et en juin on retrouve le titre et la formule antérieurs. Cependant le journal vit ses derniers mois. En février 1782, la veuve Staatman, qui veut manifestement mettre fin à son activité, fait savoir qu'elle a encore quelques exemplaires complets de la collection, et, avec le mois d'avril 1782 et le t. 192, sans explications, le Mercure historique et politique de La Haye cesse de paraître, après presque un siècle d'existence.

Auteur

Additif

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables: Dans une étude intitulée «Quelques gazettes de Hollande en langue française et le Mercure historique et politique : une analyse comparative», Hans Bots montre comment le Mercure historique collecte les informations tirées de nombreuses gazettes de langue française ; les gazettes donnent une information rapide et éphémère, alors que le mensuel fournit une synthèse des informations utiles aux historiens. Une comparaison quantitative relative à la mort de Guillaume III et à la mort de Louis XIV montre que le volume d’informations délivré par le Mercure historique dépasse largement celui des gazettes les mieux informées ; il ajoute en effet aux nouvelles tirées de nombreuses gazettes (Gazette d’Amsterdam, Gazette de Leyde, Gazette de Rotterdam, Quintessence, etc.) des documents et des «réflexions sur les nouvelles» ; il arrive en outre que le Mercure historique utilise les mêmes correspondants à l’étranger, mais donne une version complète de leurs relations.

Bibliographie: Bots, Hans, «Quelques gazettes de Hollande en langue française et le Mercure historique et politique : une analyse comparative» dans Gazettes et information politique sous l’Ancien Régime, textes réunis par H. Duranton, C. Labrosse et P. Rétat, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 1999, p. 159-168.

Auteur additif

Titre indexé

MERCURE HISTORIQUE ET POLITIQUE 1

Date indexée

1686
1687
1688
1689
1690
1691
1692
1693
1694
1695
1696
1697
1698
1699
1700
1701
1702
1703
1704
1705
1706
1707
1708
1709
1710
1711
1712
1713
1714
1715
1716
1717
1718
1719
1720
1721
1722
1723
1724
1725
1726
1727
1728
1729
1730
1731
1732
1733
1734
1735
1736
1737
1738
1739
1740
1741
1742
1743
1744
1745
1746
1747
1748
1749
1750
1751
1752
1753
1754
1755
1756
1757
1758
1759
1760
1761
1762
1763
1764
1765
1766
1767
1768
1769
1770
1771
1772
1773
1774
1775
1776
1777
1778
1779
1780
1781
1782

EXTRAORDINAIRE DU MERCURE GALANT

0927
1678
1685

Titre(s)

Extraordinaire du Mercure galant. Titre orné. Frontispice.

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

Janvier 1678-octobre 1685. 32 volumes. Le privilège du 31 décembre 1677 est celui du Mercure galant. En outre, un privilège daté du 16 avril 1678, précisant l'existence de l'Extraordinaire est octroyé par Monseigneur le Vice-Légat d'Avignon, «au sieur Amaulry, marchand libraire de la ville de Lyon».

Périodicité annoncée et réelle: un volume tous les trois mois. Datation des volumes: janvier, avril, juillet, octobre (datation anticipée).

Description de la collection

Format in-12. Nombre de pages, entre 567 (janv. 1678) et 279 (avril 1685); sur l'ensemble, 368 p. en moyenne.

Gravures, planches de musique.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

Publié à Paris, au Palais. Libraires associés: G. de Luynes, Ch. de Sercy, Et. Loyson, Jean Guignard, Th. Girard, veuve O. de Varennes, Ch. Osmont. Dans la Salle Royale, à l'Image Saint Louis. Modifications en cours de publication.

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

Fondateur: Jean DONNEAU DE VISÉ (1638-1710).

Auteurs. Ce sont des mondains. Quelques noms connus: duc de Saint-Aignan, Mme Des Houlières... La plupart des articles sont anonymes. Toutefois, quelques signatures témoignent de la variété des milieux auxquels appartenaient ces auteurs amateurs: M. d'Abloville; M. de La Salle, Sr de Lestang; M. Gardien, secrétaire du Roi; M. Panthot, médecin; M. Comiers, professeur de mathématiques. Quelques noms de femmes: Mme de La Couldre, de Caen, Mlle Frédinie, de Pontoise, Mlle Launay Buret...

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

Contenu annoncé dans le Mercure galant de février 1678: «Le premier tome de l'Extraordinaire du Mercure sera donné le 15 avril et ainsi de trois mois en trois mois... Il contiendra des lettres aussi agréables que spirituelles écrites à l'auteur du Mercure sur les plus beaux ouvrages des particuliers qu'il y fait entrer, avec plusieurs autres pièces curieuses qui feront connaître à Paris et aux Etrangers qu'il y a de l'esprit, de la délicatesse et du bon goût dans nos provinces, surtout parmi le beau sexe».

Contenu réel: de janvier à octobre 1678, l'Extraordinaire se présente sous la forme de lettres numérotées, signées ou anonymes, venues de France et de l'étranger. Il s'y ajoute des articles de mode avec des gravures, des questions galantes, psychologiques ou autres. Des énigmes, des lettres en chiffres et leurs réponses sont suivies de nombreuses signatures révélant le nom des abonnés. A partir d'octobre 1678, il n'y a plus de lettres numérotées. L'Extraordinaire complète, sans le doubler, le Mercure proprement dit. Il contient des lettres et pièces galantes, des poèmes, des fables, des «fictions» en prose sur divers sujets, des articles littéraires, scientifiques (mathématiques, médecine, optique). Quelques recherches touchent la sociologie ou la philosophie. En musique, des «airs» sont accompagnés de planches notées.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

Collection étudiée: B.N., 8° Lc2 34, microfilms m 238.

Historique

L'Extraordinaire a été interrompu en octobre 1685 alors que d'autres suppléments et des publications adjacentes comme les Affaires du temps (1688-1692) surchargeaient la rédaction.

L'Extraordinaire du Mercure galant apporte un précieux témoignage sur la culture et sur les curiosités de la société parisienne et provinciale de la fin du XVIIe siècle.

Créé à l'origine pour faire connaître dans un but publicitaire les quelques «quatre cents lettres» de satisfaction évoquées dans le Mercure de décembre 1677, l'Extraordinaire du Mercure galant publie dans les «quartiers» de janvier, avril et juillet 1678 toute une correspondance numérotée. A compter d'octobre 1678 ce supplément est composé d'articles traitant de toutes sortes de sujets. Complétant le Mercure proprement dit, il en diffère profondément. L'anonymat est moins rigoureux car bien des envois sont signés. Ils donnent une vaste représentation des goûts, des capacités intellectuelles et du milieu social des correspondants. Ces articles, plus longs que ceux du Mercure, atteignent souvent un haut niveau scientifique. Au tout premier plan, le Traité des lunettes accompagné de planches comprend onze parties sur un total de 953 p. Précédé d'une dédicace au duc de Bourgogne, il est l'œuvre de «M. Comiers d'Ambrun, prévost de Ternant, professeur de mathématiques à Paris». De longues et âpres discussions entre des médecins traitent de l'opportunité de la fréquente saignée. M. de La Févrerie publie ses réflexions sur l'Origine de la noblesse. Contrairement au Mercure, l'Extraordinaire ne contient pas de romans mais présente de nombreuses questions galantes et psychologiques avec leurs réponses. Des articles de modes avec leurs gravures mettent les dames de province au courant des usages parisiens. Les lecteurs trouvent à se distraire en proposant ou en résolvant des énigmes où tous les milieux y compris la petite bourgeoisie, trouvaient un jeu apparenté aux mots croisés ou aux rébus de nos périodiques modernes.

Si l'Extraordinaire s'interrompt après 32 livraisons, ce n'est pas à la suite d'un échec. Il est bientôt remplacé par d'autres suppléments ou publications adjacentes comme les Affaires du temps, qui développent les grands événements ébauchés dans le Mercure.

L'Extraordinaire du Mercure galant garde une existence autonome. Il ne comporte pas d'articles sur l'actualité. Complétant le Mercure sans le doubler, il enrichit notre connaissance de la pensée et de la culture de l'époque.

Additif

Bibliographie: Vincent, Monique: Mercure galant. Extraordinaire. Affaires du temps. Table analytique contenant l’inventaire de tous les articles publiés, 1672-1710, préface de Jean Mesnard, Champion, 1998, 1051 p.

Auteur additif

Titre indexé

EXTRAORDINAIRE DU MERCURE GALANT

Date indexée

1678
1679
1680
1681
1682
1683
1684
1685

LE MERCURE ANGLAIS 2 *

0912
1649

Historique

Le Mercure anglois, ou Recueil succinct des Affaires d'Angleterre, «traduit par J. Ango, interprète des langues angloise et ecossoise. Jouxte la copie imprimée à Londres par R. Lesbourne. 1649, du jeudy 25 février jusqu'au jeudy 4 mars 1649».

La B.N. possède deux exemplaires de ce texte: 4° Nc 492 et 4° Lb7 5232, ce dernier étant inclus dans un ensemble d'écrits relatifs à la mort de Charles Ier. Faut-il le considérer comme un périodique? Il y a ambiguïté sur le titre et sur la forme: Le Mercure anglois se présente comme les périodiques anglais de l'époque; et c'est ce qui a conduit les bibliothécaires à le répertorier comme tel (en particulier dans le Catalogue collectif); d'où une confusion fréquente avec Le Mercure anglois qui parut à Londres de 1644 à 1648. Or ces deux Mercure n'ont pas de rapport entre eux: le Mercure anglois de J. Ango est postérieur à l'autre et doit être traduit d'un journal royaliste; le Mercure anglois de Londres, rédigé en français et non en anglais, a toujours été favorable au Parlement. Ajoutons que le Mercure de J. Ango, «recueil succinct» dont on ne connaît qu'une livraison, peut difficilement être considéré comme périodique.

Additif

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s): Comme le notait Madeleine Fabre, il ne s’agit pas d’un périodique, mais d’un occasionnel publié après l’exécution de Charles Ier. Jean-Dominique Mellot, dans L’Édition rouennaise et ses marchés (École des Chartes, 1998, p. 175) remarque qu’il s’agit de l’un des rares imprimés publiés «jouxte la copie de Londres», et non de la «copie de Paris». Il le considère comme un produit de l’édition rouennaise. Ce petit récit de 12 pages s’apparente aux mazarinades, et Moreau l’a classé comme tel (Bibliographie des mazarinades, n° 2451) ; il le rapproche d’une autre publication de Jacques Ango : Récit véritable de tout ce qui s’est fait au procès du Roi de la Grande Bretagne, son arrêt et la matière de son exécution…, paru également en 1649.

Auteur additif

Titre indexé

MERCURE ANGLAIS 2 *

Date indexée

1649

MÉMOIRES SECRETS 2

0904
1777
1789

Titre(s)

Mémoires secrets pour servir à l'histoire de la République des Lettres en France, depuis MDCCLXII jusqu'à nos jours ; ou Journal d'un Observateur, contenant les Analyses des Pièces de Théâtre qui ont paru durant cet intervalle ; les Relations des Assemblées Littéraires ; les Notices des Livres nouveaux, clandestins, prohibés ; les Pièces fugitives, rares ou manuscrites, en prose ou en vers ; les Vaudevilles sur la Cour ; les Anecdotes et Bons Mots ; les Eloges des savans, des Artistes, des Hommes de Lettres morts, etc. etc. etc. Par feu M. de Bachaumont.

Tel est le titre complet des Mémoires secrets dits de Bachaumont. A partir du t. IX, le nom de Bachaumont ne figure plus sur la page de titre.

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

1777-1789. 36 volumes.

Date de publication des volumes : t. I-VIII, 1777 ; t. IX-X, 1778 ; t. XI-XII, 1779 ; t. XIII-XIV, 1780 ; t. XV-XVI, 1781 ; t. XVII-XVIII, 1782 ; t. XIX-XXII, 1783 ; t. XXI-XXIV, 1784 ; t. XXV-XXX, 1786 ; t. XXXI-XXXIII, 1788 ; t. XXXIV-XXXVI, 1789. A part les vol. IX, X et XXXIV, qui portent sur les années 1776, 1777 et 1787, le tome ne coïncide jamais avec une année.

Description de la collection

Les M.S. se présentent sous format in-12, sans portraits, mais avec un cul-de-lampe de temps à autre, ils ont pour devise : ... huc propius me, /... vos ordine adite. / Hor. L. II, Sat. 3. vs. 81 et 82.

La collection consultée comprend des cahiers de 24 p., 100 x 170. Les volumes comprennent entre 249 (XII) et 508 p. (XXXV).

Publiés à partir de 1777, sous forme de volumes, les M.S. constituent une chronique rétrospective qui commence le 1er janvier 1762 et se poursuit, à raison de une à plusieurs notices par jour –certains jours ne faisant, toutefois, l'objet d'aucune notice-jusqu'au 31 décembre 1787.

A partir du vol. XI, le rédacteur donne des articles antérieurs aux années en cours. Tel est le cas des Salons de 1767 à 1779 placés dans les vol. XI et XIII. Mais c'est surtout à partir du vol. XVI que le rédacteur consacre une partie importante du reste de la collection à des additions aux numéros antérieurs.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

John Adamson, Londres. Ces indications sont-elles supposées ou réelles ? Hatin (p. 480), appuyé par Jacob (Préface), affirme, sans le prouver toutefois, que les trois premières éditions, «qui ne diffèrent entre elles que par le caractère, sortirent presque simultanément des presses de Hollande». Notre incertitude, quant à nous, concerne non seulement le nom du libraire et le lieu d'impression, mais aussi le nombre des éditions des M.S.

Hatin, on l'a vu, affirme l'existence de trois premières éditions parues presque simultanément, suivies «successivement de cinq ou six autres» ; et Jacob (p. III) évalue le nombre d'éditions à l'originale, plus «[dix peut-être] qui la suivirent de près».

Les recherches que nous avons effectuées dans ce sens ne nous ont permis d'établir avec certitude que l'existence de deux éditions que nous qualifierons d'homogènes : l'édition originale, mentionnée ci-dessus, datée de 1777 à 1789 et une autre édition, également en 36 vol., datée de 1780 à 1789, différente de la première par la mise en page, la pagination, les caractères, les culs-de-lampe et l'absence du nom de Bachaumont de la page de titre.

On rencontre, il est vrai, un certain nombre d'éditions datées soit de 1778, de 1783 ou de 1784 à 1789, mais un examen de celles-ci montre qu'il s'agit de rééditions partielles, destinées à compléter les séries existantes.

Nous ne disposons pas d'indications précises sur le montant de la souscription, le nombre des abonnés et l'importance du tirage. Ce que nous savons d'une manière certaine, c'est que les M.S. jouirent d'une vogue immense auprès du public. Ceci nous est attesté par les nombreuses réimpressions dont ils firent l'objet (cf. Avertissement, vol. XV), mais aussi par les contrefaçons et les abrégés qu'ils ont inspirés.

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

La rédaction des M.S. a été assurée par Mathieu-François PIDANSAT DE MAIROBERT du commencement de la chronique jusqu'à sa mort survenue le 27 mars 1779. Elle fut poursuivie jusqu'en 1789 par Barthélémy-François-Joseph MOUFLE D'ANGERVILLE.

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

Le contenu des Mémoires secrets est annoncé, comme on l'a vu, dès la page de titre. Un commentaire plus détaillé, placé en tête du 1er volume, expose le but et le caractère du journal. Le rédacteur attentif aux nouveaux courants de pensée qui ébranlent nombre de valeurs établies, s'y promet «d'en marquer les progrès, d'en saisir les circonstances, d'en recueillir les détails les plus particuliers». Il se propose, en plus, d'offrir à ses lecteurs «un choix d'Anecdotes qu'on ne rencontre nulle part [...] ; sans parler d'une multitude de Pièces secrètes [...]. Quant aux Notices des Ecrits nouveaux, des Pièces de Théâtre, des Assemblées Littéraires, elles sont encore distinguées par une précision unique, et surtout par une impartialité qu'on attendrait en vain d'un Critique affiché pour tel». En un mot, le rédacteur se flatte de présenter au public «une Collection neuve, non moins instructive qu'amusante, et comme le Résumé des différens Journaux qu'il est presqu'impossible de lire en totalité».

Ce dessein fut respecté dans ses grandes lignes, quoique le journal verse plus allègrement dans le sens de la petite histoire que de la grande. Les anecdotes plaisantes, les pièces fugitives, les pamphlets, épigrammes et autres saillies méchantes ou amusantes y abondent ainsi que toutes ces rumeurs et secrets d'antichambres qui alimentaient les discussions et agrémentaient l'atmosphère des salons parisiens. En 1787, néanmoins, les nouvelles préoccupations dictées par les remous politiques et sociaux qui secouaient la France, suggérèrent à Mouffle d'Angerville, comme nous le verrons, d'accorder une place plus importante aux faits politiques qu'aux badinages des salons.

L'énorme succès des M.S. fut, disons-le aussi, savamment entretenu par des réclames insérées dans la chronique à partir du Xe volume et supposées provenir de nouvelles à la main. Ces réclames, dignes de nos annonces publicitaires modernes, nous apprennent entre autres, à la date du 28 juillet 1777 (M.S., X, p. 201) :

«Les Mémoires Secrets,etc. embrassent un espace de quatorze ans ; contiennent dix à douze milles notices ; fécondité dont il n'y a point d'exemple dans aucun ouvrage périodique. Il en est quelques-unes peu intéressantes en elles-mêmes, mais utiles pour conserver l'ordre chronologique des dates et des époques, si essentiel dans toutes les parties historiques. Outre les notices, il y a une foule d'anecdotes et de petites pièces en prose et en vers non imprimées jusques-là, qui font rechercher ce recueil des amateurs. Il est d'ailleurs commode pour les gens qui ne lisent que par amusement, ou sont bien aises de trouver le matin quelque chose à retenir et à citer le soir ; ils s'ornent ainsi l'esprit en peu de temps et à peu de frais».

Une Table alphabétique des Auteurs et personnages, en 1 vol., a été publiée chez A. Mertens et Fils, à Bruxelles et à Paris, en 1866.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

Collection étudiée : B.U. Göteborg, Litt. hist. Fr. Ex B. Autres collections : B.N., Z 16780 ; B.U. Lund (Suède): l'édition de 1780 à 1789.

Bibliographie

H.P.L.P., t. III, p. 480-483.

L'édition de 1780 a donné lieu à une réimpression publiée à Londres, chez Gregg, en 1970. Parmi les compilations, nous citerons les Anecdotes du dix-huitième siècle, maintes fois prises à partie par le rédacteur des M.S. Quant aux abrégés, leur nombre seul constitue une confirmation de l'extrême popularité des M.S. Il y eut ceux de Chopin de Versey (1788), de Merle (1808-1909), de Ravenel (1830), de Barrière (1846), de Jacob (1859-1874), de Lalanne (1866) et de Gay (1881).

Mentions dans la presse du temps: Correspondance secrète, politique et littéraire..., Londres, John Adamson, t. XI, 1788; Courrier politique et littéraire or, French Evening Post, t. II, 1778; Grimm, C.L., t. IX, mai 1771, p. 317-318; Linguet, Annales politiques, civiles et littéraires, t. V, 1779 et t. VII, 1780; [Mairobert, Mathieu-François Pidansat de], Anecdotes sur Me. la comtesse Dubarri, Londres, John Adamsohn, 1776; Journal historique de la Révolution opérée dans la Constitution de la Monarchie Françoise, par M. de Maupeou, Chancelier de France, Londres, 1776, 7 vol.; L'Observateur anglois, ou Correspondance secrète entre Milord All'eye et Milord All'ear, 1777-1778. – Aubertin C, L'Esprit public au XVIIIe siècle, Paris, Slatkine, 1968. – «La jeunesse de Bachaumont», publ. par Charpentier, Le Magasin de librairie, t. III, 1859, p. 5-25, 161-186, 321-336. – La Bastille dévoilée, 4e livraison, p. 19, 8e livr., p. 48-54, Paris, Desenne, 1789 et 1790.

– Bayle P. et Herbelay J., «Le journalisme clandestin au XVIIIe, La Nouvelle revue, 1905, p. 213-235, 395-413.

– Carriat A., «Un écrivain guérétois méconnu, Barthélémy Mouffle d'Angerville (1728-1795)», Mémoires de la Société des sciences naturelles et archéologiques de la Creuse, t. XXXIX, 1976, p. 637-656. – Eguilles, marquis d', «Un protégé de Bachaumont; correspondance inédite», publ. par Paul Cottin, Revue rétrospective, t. III, 1886-1887, p. 95-168, 217-240; t. IV, 121-144, 217-240; t. V, 73-96. – Flammermont J., Le Chancelier Maupeou et les parlements, Paris, Picard, 1883. – Funck-Brentano F., Figaro et ses devanciers, Paris, Hachette, 1909. – Ibid., Les Lettres de cachet à Paris. Etude suivie d'une liste des prisonniers de la Bastille (1659-1789), Paris, Imprimerie nationale, 1903. – Goncourt, E. et J. de, Portraits intimes du dix-huitième siècle, Paris, Charpentier, 1913. – Mémoires secrets de Bachaumont, par P.L. Jacob [Paul Lacroix], Paris, Garnier, 1874. – [Mouffle d'Angerville, Barthélémy], Vie privée de Louis XV, Londres, John Peter Lyton, 1781, 4 vol. – Préaudeau L. de, «Bachaumont, père des échos de Paris», Revue hebdomadaire, t. II, 1908, p. 535-552. – Tate R.S. Jr., Petit de Bachaumont: his circle and the «Mémoires secrets», Studies on Voltaire, t. LXV, 1968.

Idem, «Bachaumont revisited: some unpublished papers and correspondence», Studies on Voltaire, t. LXXXIV, 1971.

– Tourneux M., «Bachaumont, Louis Petit de», La Grande Encyclopédie, t. IV, p. 1075-1076. – Weil F., «Prévost et le Gazetin de 1740», Studi francesi, 1962, p. 474-486.

Historique

Du salon de Mme Doublet aux «Mémoires secrets». Dans un élégant salon parisien situé dans la rue Neuve des Filles-Saint-Thomas, appelé à briller davantage par l'activité clandestine de ses habitués que par la splendeur de son intérieur, s'installèrent, le 11 avril 1716, M. et Mme Doublet. Louis Doublet, secrétaire des commandements du duc d'Orléans, avait épousé, en 1698, Marie-Anne Legendre, née le 22 août 1678. A la mort de son mari, survenue en 1722, Mme Doublet avait donc quarante-quatre ans. C'était une femme douce et charmante. Son esprit fin et délicat lui attachait les noms les plus distingués du monde des lettres et des arts. Mme Doublet, ajoutons-le, maniait honnêtement le crayon. Les gravures de ses dessins, exécutés par Caylus et Mariette, en témoignent.

Sa prédilection pour l'art, Mme Doublet la partageait avec Bachaumont, un personnage rencontré probablement aux dîners du peintre Coypel. Graveur à ses heures perdues, celui-ci avait mis sa pointe au service de la charmante dessinatrice, entamant ainsi une amitié que seule la mort devait interrompre.

Louis Petit de Bachaumont, né le 2 juin 1690 dans un milieu où évoluaient hommes de lettres et éminents artistes, avait acquis un goût pour l'art à l'étude duquel il consacra les loisirs qu'un héritage considérable lui procurait: «J'ai toujours beaucoup aimé la peinture, écrit-il à Pierre, j'ai passé les premières années de ma vie à Versailles et dans les maisons royales, au milieu des peintures et des sculptures qui les décorent; j'ai eu les meilleurs maîtres de ces temps-là en tout genre; je suis venu à Paris où j'ai continué de vivre dans les mêmes occupations [...]» (Goncourt, p. 69).

Bachaumont, bien que près de douze ans plus jeune que son amie, était devenu un assidu de son salon. Il gravait les dessins de Mme Doublet et, esprit entreprenant, affable et de manières délicates, il s'était également avéré un excellent hôte. On le nomma maître des cérémonies; puis, en 1730, Bachaumont résolut carrément de s'installer à l'hôtel des Filles-Saint-Thomas. Il élut domicile au second étage de la maison dont son amie occupait le premier. Ainsi commençait une association qui allait, quarante ans durant, marquer l'évolution de la presse française.

Les habitués du salon de Mme Doublet, qu'on surnomma les Paroissiens, étaient au nombre de vingt-neuf, appartenant à différentes catégories professionnelles et sociales; ils étaient abbés, magistrats, médecins, académiciens, auteurs dramatiques, artistes, écrivains, personnes plus ou moins illustres... Parmi les Paroissiens nous citerons Voisenon, Chauvelin, Prévost d'Exiles, Durey de Meynières, Falconnet, Foncemagne, Mairan, les frères Sainte-Palaye, Mariette, Bachelier, les frères d'Argental, le chevalier de La Morlière et Pidansat de Mairobert.

Ces gens-là rassemblaient décidément tant d'esprit que l'intrépide Piron confessa à l'abbé Legendre, frère de Mme Doublet: «Annoncez bien une bête à madame Doublet et j'y serai bon» (Goncourt, p. 59). Mais tout autant que par leurs multiples connaissances, les Paroissiens se distinguaient par le non-conformisme de leurs idées; ils étaient anti-dévots, parlementaires et donc frondeurs. La société de Mme Doublet, dit Grimm (t. IX, mai 1771, p. 317), «avait été longtemps célèbre à Paris. On y était janséniste, ou du moins très-parlementaire, mais on n'y était pas chrétien; jamais croyant ni dévot n'y fut admis».

En effet, le trait commun de cette société composite résidait principalement dans sa profonde curiosité de l'événement public et de l'écho mondain: «Ce salon tenait le monde, et Paris, et la veille, et le jour, et la chaire, et l'Académie, et la comédie, et la cour» (Goncourt, p. 58). De rendez-vous des curieux, la Paroisse se transforma, au fil des confidences, en un réceptacle de l'information où chaque convive déposait sa contribution selon un rite déterminé. Les habitués du salon de Mme Doublet, regroupés autour de leur «cher Président», Durey de Meynières, président de la Deuxième Chambre des enquêtes au Parlement – ce même Durey de Meynières auquel Flammermont attribue la rédaction du Journal historique – suivi de Bachaumont, le «maître des cérémonies», se retrouvaient à la même heure dans la «salle de compagnie» garnie de vingt-neuf chaises surmontées chacune d'un portrait, les portraits des vingt-neuf Paroissiens. Ils s'installaient autour d'une table de marbre, chacun sous son image. Sur la table, disent les Goncourt (p. 60) «deux grands registres étaient ouverts, qui recevaient de chaque survenant l'un le positif, et l'autre le douteux, l'un la vérité absolue, et l'autre la vérité relative». Et ces registres dûment recopiés étaient distribués à Paris, dans la province et même à l'étranger.

Depuis quand ces nouvelles à la main étaient-elles répandues dans le public? Il est difficile de répondre avec exactitude à cette question. Funck-Brentano (p. 267), date les premières feuilles de 1737; Aubertin (p. 381), fait remonter le journal hebdomadaire de la Paroisse à 1731 et 1732 déjà, alors que Tate nous dit (p. 141): «it probably began in the late 1730s or before». Mais ces historiens de la presse française citent tous trois, pour appuyer leurs conjectures, les douze volumes manuscrits d'une correspondance conservée à la B.N., datée de 1745 à 1752, adressée par Mme Doublet à sa sœur. Nous retiendrons pour notre part la date donnée par Hatin qui offre l'avantage de s'appuyer sur un document antérieur à celui de la B.N. Dans H.P.L.P. (t. III, p. 465), il constate:

«La Bibliothèque impériale possède cinq volumes manuscrits, reliés sous le titre de Journal historique, qui sont évidemment une copie des registres de la paroisse. C'est une suite de missives adressées à madame de Souscarrière, au château de Breuillepont, par Vernon, à Pacy. Ces sortes de lettres, qui se succèdent à des intervalles très-rapprochés, vont de 1738 à 1745. En haut est inscrit, d'une autre main que le corps de la lettre: Breuillepont, comme au bas des lettres administratives et de commerce on a coutume de mettre le nom du destinataire, pour la gouverne de celui qui est chargé de les fermer et de les expédier. C'est, pour notre cas, une preuve que la copie destinée à madame de Souscarrière n'était pas unique».

Telle fut donc l'origine des fameux Mémoires secrets, dits de Bachaumont, qui constituent une des sources les plus abondantes et les plus précieuses pour l'étude du XVIIIe siècle. Les nouvelles à la main divulguées par la Paroisse continuèrent de sortir du cabinet de Mme Doublet, malgré les remontrances et les menaces réitérées de la police, jusqu'à la dissolution de la Paroisse survenue après la mort de Bachaumont et de Mme Doublet, aux mois d'avril et de mai 1771. Ainsi, les Paroissiens, sous l'égide de Mme Doublet et de Bachaumont, eurent le mérite de pressentir et de satisfaire, de 1738 au moins, à 1771, cette passion pour l'événement si caractéristique du XVIIIe siècle.

Le succès énorme dont jouit le journal de la Paroisse, et dont témoignent de nombreuses contrefaçons (cf. Funck-Brentano, p. 272-281), donna à un autre habitué du salon, au secrétaire et collaborateur de Bachaumont, l'idée de publier une partie de l'œuvre de la Paroisse et de la continuer. Les Mémoires secrets, on l'a vu, commencèrent de paraître en 1777; onze volumes virent le jour sous la direction de Mairobert en l'espace de deux ans, lorsque celui-ci, blâmé par le parlement, à l'issue du procès qui l'opposait au marquis de Brunoy, mit brusquement fin à sa vie, le 27 mars 1779.

Après Mairobert, la rédaction du journal fut assurée par Mouffle d'Angerville qui le continua jusqu'en 1787. Mouffle d'Angerville jugea bon d'apporter des additions substantielles aux volumes publiés par Mairobert, pour les raisons qu'il expose dans l'avertissement placé en tête du XVe volume et que nous reproduisons ci-dessous, mais aussi, disons-le, pour s'assurer un profit facile que garantissait l'immense succès de la chronique. Il poussa ainsi la collection à 36 vol., soit 25 vol. pour la période allant de 1779 à 1787, alors que 11 vol. seulement avaient suffi à son prédécesseur pour couvrir les années 1762 à 1778.

«Lorsque cet ouvrage parut pour la première fois, la crainte qu'il ne fût trop volumineux m'avoit fait supprimer beaucoup d'articles, croyant qu'ils ne causeraient point un vuide et que le surplus n'en paroîtroit que mieux rempli; mais plusieurs de mes Lecteurs se sont apperçus de cette soustraction et s'en sont plaints. Ils ont trouvé que le principal mérite, le mérite caractéristique de cette collection, consistant dans une chronique exacte et non interrompue, il en résultoit un défaut qu'ils m'ont invité à corriger; ce que je ne crois pouvoir mieux exécuter qu'en rétablissant les notices retranchées; leur transposition, au moyen de la méthode des auteurs de dater tous les faits, n'est que désagréable au coup-d'œil, et j'ai cru plus honnête de completter ainsi l'ancienne édition, en épargnant au public les frais de l'acquisition d'une nouvelle.

Ce qui m'a rendu plus scrupuleux dans le rétablissement, c'est l'observation aussi que tel article nul, ce semble, soit par sa brièveté, soit par son annonce, devenoit nécessaire pour l'intelligence ou l'éclaircissement d'autres plus intéressans, qui se trouvoient plus loin; chaîne que tout le monde ne remarque pas et qui n'en est pas moins réelle et sensible à ceux qui lisent avec attention et suivent la série des événemens.

Les Lecteurs ne seront pas fâchés, sans doute, de rencontrer d'autres articles omis par une raison contraire; comme trop forts, ou trop piquans. Les ménagemens qui devoient alors avoir lieu, ayant cessé, rien ne m'empêche de communiquer ces anecdotes curieuses au lecteurs».

Une autre innovation introduite par Mouffle d'Angerville consiste à accorder, à partir de 1787 (XXVe vol. ), une place plus large aux faits politiques, orientation dictée par la fermentation des esprits à la veille de la Révolution mais inspirée aussi par le but que s'étaient prescrit les Paroissiens; à savoir celui d'instruire plutôt que de plaire.

«Il faut distinguer dans notre ouvrage deux parties, l'agréable et l'utile; heureux qui peut réunir les deux! mais un auteur estimable cherche toujours la dernière, et certainement Bachaumont qui le premier imagina notre collection ne l'avoit pas négligée. Pour s'en convaincre il suffit de suivre les Editeurs dans leur discussion raisonnée qui se trouve en tête de ces Mémoires.

En observant le même plan que Bachaumont, nous avons cherché à l'étendre, c'est-à-dire, en ne négligeant point ce qui pouvoit amuser, nous nous sommes efforcés d'y joindre encore plus ce qui pouvoit instruire. En effet, il s'étoit, comme l'indique le titre, borné à la littérature. Nous avons cru devoir aussi travailler pour l'histoire. Nous n'avons écarté que la partie absolument politique, à laquelle sont spécialement affectées les gazettes. Celles-ci ne sont guères que le théâtre des Souverains. Le nôtre est celui de nos semblables. Nous pensons que ce genre d'histoire vaut bien l'autre; qu'il y a beaucoup plus de fruit à tirer de la lecture des avantures de la Société, que du récit des Sièges, des Batailles, des grandes Négociations, des Cérémonies consignées avec tant de soin dans ces papiers publics». (Avertissement, vol. XXV).

Les rédacteurs des «Mémoires secrets». Les historiens de la presse française du XVIIIe siècle qui se sont penchés sur les Mémoires secrets s'accordent en général pour attribuer à Bachaumont la rédaction des années 1762 à 1771, à Mairobert celle des années 1771 à 1779 et à Mouffle d'Angerville, le reste. En fut-il vraiment ainsi?

Les témoignages qui sont parvenus jusqu'à nous laissent peu de doutes sur le rôle joué par Mairobert dans la rédaction des Mémoires secrets. Mairobert était le type même du journaliste accompli. Sa passion pour la littérature et le théâtre, son engouement pour l'événement politique, son esprit fougueux et son tempérament frondeur le portaient d'emblée vers ce métier où il allait exceller. Mouffle d'Angerville, qui le connaissait bien, le dépeint en ces termes:

«Pidansat de Mairobert, vif et souple, intrigant et hardi, parleur caustique, oracle des foyers de la comédie, courtisan des lieutenants de police, habile à changer de masque et à se faufiler chez les grands, nous figure assez bien un diminutif de Beaumarchais. Remuant comme ce modèle, il lui manque cependant la verve étincelante, le turbulent génie du grand charlatan». (Funck-Brentano, p. 284).

Et la production littéraire, et surtout journalistique de Mairobert est à la mesure du personnage. On lui prête, entre autres, les Anecdotes sur Me. la comtesse Dubarri (1775), le Journal historique (7 vol., 1774-1776 ), et L'Observateur anglois (4 vol., 1777-1778); les Anecdotes sur Me. Dubarri et le Journal historique ayant, tous deux du reste, alimenté les Mémoires secrets.

Mairobert, on l'a vu, était un habitué de la Paroisse où il remplissait les fonctions de secrétaire et de collaborateur de Bachaumont:

«M. de Mairobert étoit un homme de lettres, auteur de quelques opuscules, mais surtout grand amateur; il ne manquoit aucune pièce de théâtre dans sa primeur et se faisoit entourer dans les foyers; il avoit aussi toutes les nouveautés et sa bibliothèque étoit en ce genre une des plus curieuses de Paris. Elevé dès son enfance chez Madame Doublet, il y avoit puisé ce goût, ainsi que celui des nouvelles; c'étoit un des rédacteurs; il conservoit le journal qui se composait chez cette Dame et le continuoit; il avoit eu différentes prises avec la police relativement à ce manuscrit, qu'il donnoit à ses amis de Paris et de province; mais on n'avoit pu le priver de cet amusement instructif et agréable, d'autant qu'il étoit fort circonspect». M.S., 3 avril 1779, t. XIV, p. 12).

Qu'il fût nouvelliste, Funck-Brentano (p. 281), nous en fournit encore une preuve en reproduisant un rapport de la police où il est dit à la date du 31 janvier 1766, à propos de bulletins répandus par un nommé Gillet, valet de chambre de Mme d'Argental: «Ce sont des nouvelles auxquelles M. de Mairobert travaille. Elles sortent de chez Mme Doublet». La bibliothèque Mazarine possède douze volumes de nouvelles à la main commençant en 1762, comme les Mémoires secrets, et finissant en 1779, à la mort de Mairobert. Ces gazetins, quoiqu'inférieurs aux Mémoires secrets - les articles communs aux deux chroniques ne sont pas rapportés dans les mêmes termes et chaque recueil renferme, de plus, des anecdotes qu'on ne trouve pas dans l'autre - proviennent, il ne fait pas de doute, des registres de la Paroisse. Brentano, à qui nous devons ce renseignement, nous rapporte que la dernière gazette du recueil de la Mazarine, datée du 17 mars 1779, porte ces mots:

«Il est très vrai, Monsieur, que c'est moi qui vous ai adressé dernièrement un paquet renferment plusieurs papiers publics... Quant aux nouvelles à la main, il n'y a plus à en espérer. L'auteur a jugé à propos de passer de ce monde-ci dans l'autre, pour ne point survivre à un jugement diffamant rendu contre lui dans un procès où il s'est trouvé impliqué. Ce malheureux [Pidansat de Mairobert] a choisi un genre de mort assez singulier. Il s'est emparé chez lui de deux rasoirs et d'une paire de pistolets, a été de là aux bains de Poitevin, où, après s'être mis dans l'eau, il s'est coupé les veines, mais, entendant du bruit, et craignant que l'on ne vînt à son secours, il a ramassé le peu de forces qui lui restait pour prendre un pistolet qu'il avait disposé et s'est fait sauter la cervelle. Il paraîtra sans doute étonnant qu'un homme, qui déclamait si souvent contre le suicide, ait eu la faiblesse de s'y livrer. J'ai l'honneur... Signé: Courtin» Figaro et ses devanciers, p. 292).

Parmi d'autres indices qui lient Mairobert aux Mémoires secrets, il y a encore la réclame du 19 août 1780 (M.S., t. XV, p. 290) où le rédacteur, après avoir annoncé la rentrée en France des volumes XIII et XIV, affirme: «la crainte qu'on avoit que la mort de l'auteur auquel on les attribuoit n'empêchât la continuation, cesse: l'on conçoit l'espoir, au contraire, que cet ouvrage utile se perfectionnera de plus en plus». Il y a aussi les témoignages répétés d'un Linguet exaspéré:

«Il s'occupoit sur-tout d'un de ces gazetins manuscrits, qui circulent, comme je l'ai déjà observé, chez l'étranger et dans nos Provinces, où l'on ramasse toute la fange de notre Capitale, où le faux et le vrai sont également recueillis, où l'intriguant redoutable est encensé, et le mérite modeste percé d'atteintes d'autant plus dangereuses, que par cette distribution adroite de la louange et de la censure, les mains qui compilent ces monumens du mensonge, lui assurent la confiance due à la vérité. A trente lieus de Paris, on regarde presque le soin qu'ils ont de flatter quelquefois, comme une preuve qu'ils ne calomnient jamais.

Mairobert, pour éterniser les fruits de son travail, prenoit soin de les réunir de tems en tems en corps complets, et de les imprimer en forme de volumes suivis: c'est ce qui a produit dix ou douze volumes intitulés Mémoires secrets, etc. par M. de Bachaumont; réservoir infernal d'impostures, comme je l'ai déjà observé, où cependant la postérité croira peut-être trouver des ressources pour notre histoire, et d'après lequel elle réglera son mépris, ou son estime». Annales politiques, t. V, p. 316-317; voir également t. VII, p. 457).

S'il fut relativement aisé de rapprocher le nom de Mairobert des Mémoires secrets, il en fut tout autrement pour la personne de Mouffle d'Angerville sur laquelle la plupart des historiens de la presse du XVIIIe siècle s'entendent pour lui prêter la continuation des Mémoires secrets mais aucun, à notre connaissance, n'en fournit la preuve. Mouffle d'Angerville s'était décidément bien prémuni contre les regards indiscrets puisqu'il fallut attendre l'étude d'Amédée Carriat, parue en 1976, pour que soit enfin jetée une lumière sur l'identité de cet écrivain très souvent confondu avec un homonyme par nos contemporains.

A. Carriat nous apprend que Barthélémy-François-Joseph Mouffle d'Angerville (1728-1795), né à Guéret, quitta sa ville natale en 1742 pour s'installer à Paris. Il travailla, à partir de 1748, dans l'administration de la marine qu'il quitta le 14 février 1760, ayant entre temps fait un court séjour à la Bastille, en 1750, pour avoir écrit avec Rochon de Chabanne Les Cannevas de Paris. A partir de 1760, et 21 ans durant, les renseignements sur la vie de Mouffle font défaut, et si son nom est incidemment évoqué pendant cette période, c'est toujours en relation avec quelqu'ouvrage anonyme et prohibé. Tel fut le cas lors de la parution du Journal historique auquel son nom, ainsi que celui de Mairobert, furent associés, sans que l'on sût au juste la part réelle qu'il y prit. Ce qui est sûr, cependant, c'est qu'à partir de 1766, notre homme était déjà converti au journalisme puisque, lorsqu'on retrouve sa trace, en 1781, dans les registres de la Bastille, où il a été incarcéré du 21 février au 3 avril, l'auteur de La Bastille dévoilée (8e livraison, p. 43) nous dit: «On enleva tous ses papiers et sept cartons remplis de bulletins ou nouvelles à la main, formant une collection depuis 1766 jusqu'en 1781».

Quelles étaient ces nouvelles à la main saisies chez Mouffle d'Angerville? Avaient-elles un rapport avec les registres de la Paroisse, et peut-être même avec les Mémoires secrets? Cela est fort probable.

Tate (p. 112) nous dit, sans le prouver toutefois, que Mouffle faisait partie des habitués du salon de Mme Doublet; assertion qu'appuie Carriat en évoquant de lointains liens de parenté entre Mouffle et Bachaumont.

Le séjour de Mouffle d'Angerville à la Bastille fut, nous l'avons vu, de courte durée. Il fallut que son délit fût véniel, ou bien que les bulletins trouvés en sa possession ne fussent pas ce que la police cherchait en premier lieu.

En effet, à la même époque, circulait un ouvrage virulent contre le règne de Louis XV, intitulé Vie privée de Louis XV, qui rappelle par son style les Anecdotes sur Me. la comtesse Dubarri, de Mairobert. L'ouvrage, on s'en doute bien, suscita de fébriles recherches de la part de la police. Dans la Correspondance secrète, politique et littéraire (t. XI, du 7 mars 1781, p. 125) le rédacteur nous rapporte:

«Il paroît depuis douze à quinze jours une Vie privée de Louis XV,en quatre volumes in-12. L'écrivain [...] juge très-hardiment tous les personnages de la scène qu'il remet sous nos yeux: la manière de cet auteur ressemble assez à celle des Anecdotes de Madame du Barry. On assure qu'il se nomme Mouffle de Georville, et qu'il vient d'être mis à la Bastille pour fruit de ses veilles».

Et plus loin, à la date du 19 mars 1781 (p. 143): «L'auteur de la Vie de Louis XV, n'est pas M. Mouffle de Georville, comme on me l'avoit assuré et comme je vous l'avois marqué: c'est un nommé M. d'Angerville».

Or, un examen de la Vie privée de Louis XV frappe, non seulement par une certaine identité de style avec les Anecdotes sur Me. la comtesse Dubarri et les Mémoires secrets, mais surtout par certains passages qui sont communs aux trois ouvrages (cf. par exemple Vie privée, t. IV, p. 268, Anecdotes, p. 328 et M.S., t. XXVII, 15 mai 1774, p. 261-262; Vie privée, t. IV, p. 270-271, Anecdotes, p. 328 et M.S., t. VII, 10 mai 1774, p. 194-195; Vie privée, t. IV, p. 272-274, Anecdotes, p. 329, et M.S., t. VII, 8 mai 1774, p. 193 et 261).

Une autre constatation qui découle de l'examen de la Vie privée de Louis XV, réside dans le fait que les portraits insérés dans cet ouvrage sont identiques à ceux inclus dans les Anecdotes sur Me. la comtesse Dubarri et dans le Journal historique, attribué, on s'en souvient, aussi bien à Mairobert qu'à Mouffle d'Angerville et dont de nombreux articles sont reproduits par les Mémoires secrets (cf. Vie privée, t. IV, p. 164 et Journal historique, t. I, frontispice; Vie privée, p. 257 et Journal historique, t. I, p. 383; Vie privée, p. 158, Journal historique, t. II, p. 171 et Anecdotes, frontispice). D'où notre conviction que Mouffle d'Angerville a eu une part active à la rédaction des Mémoires secrets, sinon du vivant de Mairobert, du moins après la mort de ce dernier.

Il nous reste à voir maintenant si Bachaumont, que la postérité a retenu comme l'instigateur de la chronique et son rédacteur initial, fut réellement le père des Mémoires qui portent son nom. Force nous est de constater que bien des éléments parlent en défaveur de cette thèse pourtant si largement répandue. Il y a tout d'abord, comme le fait remarquer Maurice Tourneux (La Grande Encyclopédie, art. «Bachaumont»), l'âge avancé de Bachaumont: il avait 72 ans à l'époque où s'ouvre le journal.

Nous remarquerons ensuite que si les années 1762 à 1771 constituent, comme l'avancent de nombreux historiens, la reproduction d'un journal que Bachaumont aurait tenu de son vivant, nulle trace de ce document n'a été signalée, ni dans les rapports de la police après les perquisitions effectuées chez Mairobert et Mouffle d'Angerville, ni par les recherches plus modernes entreprises dans ce sens, alors qu'un certain nombre de nouvelles à la main issues des registres de la Paroisse – qui présentent des affinités avec les Mémoires secrets, sans en être une copie fidèle – ont été retrouvées. D'où notre conviction que ce journal n'a pas existé. Et même s'il en était autrement, il y aurait eu lieu de s'attendre à une différence de facture entre la période attribuée à Bachaumont et celle assurée par Mairobert, or nous n'avons pas, pour notre part, relevé d'écart de style entre ces deux périodes.

Signalons, de plus, qu'il y a dans les premières années des Mémoires secrets certains commentaires qui paraîtraient pour le moins anachroniques si Bachaumont en eût été l'auteur; nous citerons, à titre d'exemple, cette notice en date du 26 mai 1764 où le rédacteur s'exclame à propos de Mme Bellot, la future épouse de Durey de Meynières, l'ami et le collaborateur de Bachaumont:

«Madame Bellot, cette femme qui avoit vécu jusqu'à présent dans une grande pénurie et du profit très mince de ses traductions angloises, demeure depuis quelque tems avec le Président Mesnieres qui s'en est engoué; elle mene sa maison, y fait la pluie et le beau tems. Ce phénomène est d'autant plus rare que cette Dame est peu jeune; elle est laide, sèche et d'un esprit triste et mélancolique; elle a renvoyé le Chevalier d'Arq, avec qui elle vivoit». (M.S., t. II, p. 63).

L'argument principal sur lequel se sont appuyés les biographes de Bachaumont pour lui attribuer les Mémoires secrets, le fameux prospectus daté de 1740, trouvé par Goncourt (cf. p. 60), et qui annonce la création de nouvelles à la main par un écrivain connu - où d'aucuns ont voulu voir l'ébauche des Mémoires secrets – ne soutient pas l'examen; d'une part, Bachaumont n'était pas un écrivain connu en 1740, et d'autre part, Françoise Weil ainsi que Robert Tate ont montré que ce prospectus se rapportait davantage au gazetin entrepris par l'abbé Prévost qu'aux Mémoires secrets.

Nous conclurons en reproduisant deux lettres adressées – l'une par un expéditeur anonyme, la seconde par le chevalier de Bachaumont, peut-être le neveu à la mode de Bretagne de notre Bachaumont – au rédacteur du Courier politique et littéraire [Courrier de l'Europe]. Ces deux lettres, bien que favorables aux Mémoires secrets, désavouent catégoriquement l'attribution qu'on en fait à Bachaumont (je tiens à exprimer ma vive gratitude à Mme Mavis von Proschwitz pour m'avoir si aimablement communiqué ces deux lettres qui n'ont pas, à ma connaissance, été signalées auparavant):

«Paris, 29 Dec. [1777]

Récemment instruit, Monsieur, de l'existence d'un livre, ayant pour titre: Mémoires secrets pour servir à l'histoire de la République des Lettres en France, depuis 1762 jusqu'à nos jours; ou Journal d'un Observateur, contenant les Analyses des pièces de Théâtre qui ont paru durant cet intervalle; les Relations des Assemblées Littéraires; les Notices des Livres nouveaux, Clandestins, prohibés; les Pieces fugitives, rares ou manuscrites, en prose ou en vers; les Vaudevilles sur la Cour; les Anecdotes et bons Mots, les Eloges des Savants; des Artistes; des Hommes de Lettres morts, etc. etc. etc. Par feu Mr. de Bachaumont:j'ai voulu me le procurer; je n'ai pu l'avoir qu'à grands frais, avec beaucoup de peine et après un assez long tems. Comme j'ai été quarante ans de la société de Mme. Doublet, où j'ai vécu avec Mr. de Bachaumont; que j'ai rédigé en grande partie le Journal de cette femme célebre; j'étois empressé de voir ce qui pouvoit donner lieu à l'attribution qu'on en fait au Philosophe défunt. J'ai comparé soigneusement le nouvel ouvrage avec notre manuscrit, que je conserve complet, et j'ai trouvé qu'il y avoit des articles, en très-petit nombre, il est vrai, exactement semblables, que tout le reste étoit omis et suppléé par une infinité d'autres très-piquants, mais dont n'étoit pas susceptible une feuille avouée, ostensible et faite pour s'envoyer par la poste, dans les Provinces et par toute l'Europe.

Voilà, Messieurs, le résultat de mon examen. Je crois que le public sera bien-aise de savoir à quoi s'en tenir sur le degré d'identité des Mémoires secrets avec ceux qui s'écrivoient chez Mme. Doublet, j'ai choisi votre Gazette, la plus répandue pour l'en instruire. L'anecdote est intéressante à cette époque où la littérature s'occupe d'un livre qui doit faire du bruit nécessairement par la multitude de gens qui y figurent. On ne peut disconvenir que l'impartialité ne soit le caractère distinctif qui y domine, qualité commune encore avec le modèle. Il est à souhaiter que cet ouvrage précieux, pour les étrangers surtout, soit continué, et qu'on en fasse une autre édition où les noms propres soient restitués dans leur intégrité, et qu'on la purge des fautes typographiques, trop ordinaires dans les livres françois imprimés en Hollande ou en Angleterre. J'ai l'honneur, etc.».

(Courier Politique, 6-9 janv. 1778, t. II, p. 24).

«A mon retour de la mer j'ai été bien surpris, Monsieur, d'apprendre qu'il couroit sur le compte de mon oncle une œuvre posthume en huit volumes, portant pour titre: Mémoires secrets pour servir à l'histoire de la république des lettres en France, depuis 1762 jusqu'à nos jours; ou Journal d'un observateur, contenant les analyses des pièces de théâtre qui ont paru durant cet intervalle; les relations des assemblées littéraires; les notices des livres nouveaux, clandestins, prohibés; les pièces fugitives, rares ou manuscrites, en prose ou en vers; les vaudevilles sur la Cour; les anecdotes et bons mots, les éloges des savants; des artistes; des hommes de lettres, etc. etc. etc. par feu Mr. de Bachaumont.

J'étois occupé à l'examiner pour pouvoir la désavouer plus en connoissance de cause, lorsque votre N° III. m'est tombé entre les mains; j'y ai lu une lettre anonyme qui me devançoit à cet égard, mais comme je ne l'ai pas trouvée assez positive, voici ce que j'ai à y ajouter:

Mr. de Bachaumont étoit trop paresseux pour s'être jamais livré à composer un ouvrage de cette étendue, qui, comprenant douze à quinze mille notices sur toute sorte de sujets, suppose un travail immense, une activité incroyable pour tout lire, tout voir et tout entendre. Il étoit en outre trop ami de son repos pour s'être ainsi attiré sur les bras presque la littérature entière par une critique, impartiale il est vrai, mais d'une sévérité excessive; il auroit encore moins exercé une censure souvent juste, mais toujours amere contre une infinité d'autres personnages dont le ressentiment étoit à craindre.

Je puis vous assurer encore qu'il ne s'est trouvé aucun manuscrit de cette espèce dans ses papiers, d'où l'on pût inférer qu'il eût imaginé le plan très-bien conçu qu'on lui suppose dans la préface.

Quant à Mme. Doublet, cette femme respectable, chez qui mon oncle est mort et a passé les deux tiers de la vie, tout le monde sait en effet qu'elle composoit un Journal de cette espece, dont les Feuilles se distribuoient tous les jours chez elle, Journal très estimé et qui rendoit sa société extrêmement agréable et instructive pour ceux qui avoient le même goût. Par un privilège spécial, c'est peut-être le premier bureau de bel esprit qui n'ait pas été ridicule.

Quoique presque tous les commensaux de cette femme célèbre soient morts, on pourroit trouver encore son manuscrit dans cinq ou six bibliothèques, telles que celles de Mr. Dargental, de Mr. l'Abbé de Chaupy, de Mr. le Président de Meniere, de Mr. de Mairobert peut-être de M. Ste. Palage, et de Mme. la Comtesse de Voisenon; mais tous ces personnages sont trop graves pour avoir souffert qu'il en transpirât rien dans le public; ce ne peut donc être que par une infidélité manifeste, s'il se trouve dans l'imprimé quelques articles semblables au manuscrit. Au reste de quelque part que vienne le larcin, je conviendrai que ce livre est très-amusant, très-piquant, très-instructif même, pourvu qu'on en décharge la mémoire de mon oncle.

Je profite de cette occasion, Monsieur, pour vous féliciter sur votre Gazette qui a déjà passé les mers depuis long-temps et fait les délices de nos colonies.

Je suis, etc.

Le Chevalier de Bachaumont».

(Courier politique et littéraire, 13-17 févr. 1778, t. II, p. 110-111).

Si Bachaumont ne fut pas, comme on l'a longtemps cru, le rédacteur initial des Mémoires secrets, nous constaterons, néanmoins, que ceux-ci ont hérité de l'esprit de la Paroisse, par l'orientation des idées politiques qu'ils véhiculent, et par l'abondance et la diversité des matières qu'ils abordent.

Les Mémoires secrets, à l'instar du journal de la Paroisse, se voulaient l'écho de la vie publique et mondaine de leur temps et ils y sont parvenus. Rien ne manque, en effet, à ce vaste répertoire, ni les événements politiques, littéraires et dramatiques les plus saillants, ni le menu détail des anecdotes, chansons, épigrammes et autres pièces fugitives qui faisaient les délices de la société parisienne, pas même les rumeurs, fausses ou avérées, qui conditionnent les esprits et forgent les opinions.

Mais si le contenu des Mémoires secrets reflète les principes tracés par leurs prédécesseurs, à Mairobert et à Mouffle d'Angerville seuls revient le mérite de cette concision du style et de cette acuité du regard qui caractérisent l'ensemble de l'œuvre, et en rendent la lecture si facile et si agréable.

La chronique, il va de soi, a aussi ses défauts, car cette même concision qui en fait le charme la dessert quand il s'agit d'offrir au lecteur une étude serrée des grands débats de l'époque. A cet égard, la plume de Mairobert et de Mouffle d'Angerville n'égale pas, il va sans dire, la profondeur des vues et la rigueur analytique de Grimm ou l'élégance de style de La Harpe. En revanche, les Mémoires secrets, qui ne sont pas contraints à une sélection des matériaux et à une certaine retenue imposées par la qualité et le goût de leurs lecteurs, comme ce fut le cas des correspondances littéraires de Grimm et de La Harpe, rendent compte de tous les événements, dans l'ordre, ou plutôt dans le désordre où ils surviennent, et c'est à ce titre qu'ils constituent un monument précieux de l'histoire des mœurs et des idées de la seconde moitié du XVIIIe siècle.

Additif

Historique: Une édition critique des M.S. a été entreprise en 2009, sous la direction de Christophe Cave et de Suzanne Cornand, avec le concours de 25 collaborateurs (Honoré Champion, 5 volumes parus, 2009-2010). Le texte a été établi d’après les principales éditions identifiées et en tenant compte des manuscrits conservés. Une introduction importante traite des principaux problèmes posés par les M.S.: problèmes d’auteurs, de contexte et de genre ; une chronologie de la publication et une histoire éditoriale permettent d’éclairer l’histoire très complexe de l’édition et de ses contrefaçons. Cette édition réalise un rêve qui fut celui des auteurs des M.S. et notamment de Moufle d’Angerville : elle intègre au texte initial toutes les additions en leur place chronologique et en facilite la consulation par des index des noms et des titres très détaillés. Parmi les apports les plus notables de cette édition, on comptera l’étude des manuscrits des M.S. (notamment de la BHVP et de la BnF) et des nouvelles à la main qui sont à leur source, la confirmation du rôle purement emblématique de Bachaumont et de Mme Doublet, et du rôle prédominant de Mairobert et de Moufle, mais aussi l’intervention de différents sous-groupes sociaux ; à quoi s’ajoute une étude interne du discours théorique (avertissements, commentaires sur la méthode des rédacteurs). L’étude des éditions, extrêmement complexe, fait apparaître au moins quatre collections : l’originale de 1777, l’édition pirate de Genève de 1780, la réédition de 1781 et deux éditions pirates en 1784. Plus complète que l’éude de Françoise Weil («Une entreprise éditoriale mystérieuse», DHS n°40, 2008, p. 485-501), elle ne la contredit pas. Le problème de l’éditeur fictif «Adamson» ou «Adamsohn» à Londres reste entier ; S. Cornand signale seulement l’importance du libraire d’Amsterdam Harrevelt, souvent cité. Quant au problème du «continuateur» de Bachaumont pour les Salons, il est clairement posé, sans avoir encore trouvé sa solution. Bernadette Fort avait mis en lumière le rôle de Mairobert dans la composition des «salons», publiés rétroactivement dans les MS   ;   voir Les ‘Salons’ des Mémoires secrets (1767-1787), éd. de l’E.N.S. des Beaux-Arts, Paris, 1999 ; mais l’identité de cet auteur, sans doute unique, reste à trouver.  Parmi les apports de cette édition, on notera également l’étude des intertextes, et notamment des ouvrages issus de la «mouvance Mairobert» ; un colloque entier leur a été consacré, dont on trouvera les textes dans un volume publié sous la direction de Christophe Cave, Le Régne de la critique. L’imaginaire culturel des ‘Mémoires secrets’ (Honoré Champion, 2010) ; on y verra exposés les rapports entre les M.S. et les gazettes (C. Labrosse), l’Observateur anglais (J. Sgard), les Anecdotes sur Mme la comtesse du Barry (C. Cave), le Mercure et l’Année littéraire (S. Dumouchel) et la Vie privée du duc de Chartres (O. Ferret), à la suite de nombreuses études sur la critique politique, littéraire, artistique dans les M.S.

Dans une étude très documentée, fondée sur son Répertoire des nouvelles à la main (Oxford, Voltaire Foundation, 1999), François Moureau a éclairé le petit monde des  founisseurs de nouvelles des M.S. Il remonte aux premières nouvelles manuscrites publiées dans le cercle Doublet de 1738 à 1753 et au gazetin de Prévost, alimenté par Laurent-Maximilien Gauthier, avant de s’attarder sur le ms. Penthièvre, propriété de Pidansat de Mairobert, l’une des rares survivances de ce qui fut peut-être le «registre» Doublet. Les M.S. compilés par Pidansat apparaissent comme une recomposition des registres, eux-même élaborés à partir de différents receuils de nouvelles à la main. Voir F. Moureau : «Du manuscrit à l’imprimé : les Mémoires secrets», dans La Plume et le plomb, PUPS, 2006, chap. VIII, p. 477-490.

Auteur additif

Titre indexé

MÉMOIRES SECRETS 2

Date indexée

1777
1778
1779
1780
1781
1782
1783
1784
1785
1786
1787
1788
1789

MÉMOIRES HISTORIQUES, POUR LE SIÈCLE COURANT

0896
1728
1742

Titre(s)

Mémoires historiques, pour le siècle courant; Avec des Réflexions et Remarques politiques et critiques. Par l'Auteur qui a ci-devant fait les Lettres historiques.

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

1er juillet 1728-1er octobre 1742. 42 volumes. Périodicité annoncée: «Ces mémoires paraîtront exactement tous les premiers de chaque mois». Programme presque exactement réalisé.

12 numéros par an. 4 numéros par tome, à partir du t. 2. T. 1-2, 1728; t. 3-5, 1729; t. 6-8, 1730; t. 9-11, 1731; t. 12-14, 1732; t. 15-17, 1733; t. 18-20, 1734; t. 21-23, 1735; t. 24-26, 1736; t. 27-29, 1737; t. 30-32, 1738; t- 33-35. 1739; t. 36-38, 1740; t. 39-41, 1741; t. 42, 1742.

Description de la collection

Tomes à pagination continue divisés en 12 publications mensuelles. La pagination reprend à zéro à partir de chaque premier janvier d'une nouvelle année. Le numéro mensuel fait environ 115 p.

Nombre de pages du cahier: 12; 70 x 130, in-8°.

Devise: Ne qua suspicio gratia fit, ne qua simultatis, Cicero, de Orat.

Le premier tome comprend les mois de juil., août, sept. 1728 (358 p.); le t. 2, les mois d'oct., nov., déc; il s'arrête à la p. 709; le t. 3, qui commence sur la livraison de janv. 1729, débute à la p. 3, etc.; le t. 3 comprend les mois de janv., févr., mars, avril 1729; le t. 4 les mois de mai, juin, juil., août 1729; et ainsi de suite: 4 mois par volume.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

«A Amsterdam chez Nicolas Potgieter, Libraire vis à vis de la Bourse». On trouve à partir du t. 3: «A Amsterdam chez Nicolas Potgieter, Libraire, vis à vis de la Bourse et à La Haye, chez Adrien Moetjens, Libraire». A partir du t. 9: «A Amsterdam chez E.J. Ledet et compagnie» (1731). Jusqu'au dernier tome il s'agira toujours d'Etienne Ledet.

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

Fondateur: Jean-Biaise DESROCHES-PARTHENAY (1690-1766). Né Jean-Biaise Desroches, se fait appeler «de Parthenay».

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

«Ce ne sont pas ici des Mémoires étendus, qui renferment généralement tout ce qui se passe dans l'Europe jusqu'aux moindres circonstances. Ce n'est pas non plus un froid Echo des Gazettes, ni une sèche compilation des Nouvelles Courantes, dont les oreilles du public ont été rebattues dans toutes sortes de Langues. C'est un ouvrage qui sera, à ce qu'on se persuade, moins ennuyeux qu'une simple répétition et plus utile que ces amas confus de faits, où il semble que l'on ait pour principe de circonstancier ce qui n'est pas important et de passer sous silence ce qu'il y a de plus intéressant. En un mot c'est un ouvrage auquel on tâche de donner les qualités que Cicéron demande dans la matière d'une Histoire; savoir: que ce soient de grandes choses et qu'elles soient dignes d'être racontées au Public... Sans s'arrêter à la superficie des choses, on rend compte des motifs, en même temps que l'on parle des événements; sans prétendre fouiller dans les cœurs; pour connaître les pensées, on raisonne seulement sur les actions ou sur les Ecrits des hommes; et sans violer le sanctuaire secret du Cabinet des Souverains on se contente de mettre dans son jour ce qu'ils veulent bien en laisser transpirer, et qu'ils ne se seront pas souciés de cacher au Public. Quant à l'ordre que l'on a suivi, ce n'est qu'après y avoir bien réfléchi, que l'on s'est déterminé à rapporter de suite les événements, qui concernent chaque Etat» (Préface). Desroches, qui, selon sa formule, s'emploie à «satisfaire des désirs raisonnables», y parvient.

Les Mémoires couvrent, pour chaque mois, les articles suivants: article I, Mémoires d'Italie, de Piémont, de Suisse; article II, Mémoires des Pays du Nord, Pologne, Suède, Danemark, Russie; article III, Mémoires de Turquie et d'Allemagne; article IV, Mémoires de la Cour de France et de différentes villes de ce Royaume; article V, Mémoires de la Grande-Bretagne; article VI, Mémoires d'Espagne et de Portugal; article VII, Mémoires des Pays-Bas. Desroches suit tout au long de ses Mémoires cet ordre.

Chaque publication débute sur les nouvelles de Rome, de la santé et des actions du pape (exemple: «Le Pape a été depuis quelque temps fort incommodé de la goutte», février 1735). L'élection d'un nouveau pape constitue bien sûr l'événement essentiel du moment, même si Desroches note son atmosphère étrangement dépassionnée: «On peut dire qu'on n'a jamais vu pendant les vacances du Saint Siège une tranquillité pareille à celle qui règne ici depuis la mort de Clément XIII. Il n'y est pas encore arrivé le moindre désordre, tout y est fort soumis, et le Peuple attend paisiblement l'élection d'un nouveau Pape» (mai 1740). Les nouvelles de la Cour de Versailles sont feutrées, elles s'alignent sur l'observance stricte de l'Etiquette: «Le 2 de ce mois, le Roi quitta le deuil qu'il avait pris le 12 du précédent pour la mort de la Reine Première Douairière d'Espagne. Le 6, il eut Concert chez la Reine, et Mgr. le Dauphin alla tirer dans le Parc» (sept. 1740). Les Mémoires s'attachent également aux nouvelles militaires, et des relations entre les Cours, en particulier des cours italiennes.

La table des matières est donnée à la fin de chaque publication mensuelle.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

B.N., 8° G 8636 (manque janv.-juin 1742).

Bibliographie

Sur Jean-Biaise Desroches-Parthenay, voir D.P. 2 .

Historique

Dans une lettre de Jean-Baptiste de Boyer, marquis d'Argens à Prosper Marchand, vers le 17 mars 1737, on trouve l'aveu de l'auteur de sa collaboration anonyme aux Mémoires historiques pour le siècle courant. «Je fus prié par Voltaire d'en faire trois feuilles qu'on inséra avec l'ouvrage de deroche [sic] ces trois feuilles étaient comme une émétique qu'on voulait lui donner pour l'empêcher de mourir» (cf. Studies on Voltaire, t. CCXXII, p. 132). Ces trois feuilles sont dans le t. 26 des Mémoires. D'Argens avait déjà collaboré à la publication de Desroches en 1736.

Additif

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares: La Bibliothèque d’État de Bavière possède une collection (Eur. 501) plus complète que celle de la BnF, et qui va jusqu’en décembre 1745 ; les volumes de 1743, 1744 et 1745 gardent la distribution en trois trimestres (janvier-avril, mai-août, septembre-décembre) réunis en un volume annuel.

Auteur additif

Titre indexé

MÉMOIRES HISTORIQUES, POUR LE SIÈCLE COURANT

Date indexée

1728
1729
1730
1731
1732
1733
1734
1735
1736
1737
1738
1739
1740
1741
1742

MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE DE DIJON *

0874
1769
1773

Titre(s)

Mémoires de l'Académie de Dijon.

Description de la collection

I, CL + 447 p.; II, LXXVII + 580 p. Deux tomes composés de 2 parties: I, histoire, belles-lettres, curiosités naturelles, séances. II, mémoires, essais, dissertations, vers, observations, remarques, extraits.

Frontispice: 2 amours. Format in-8°. Planches: I, lame servant pour l'opération de la taille; galère allégorique; II, camp romain; hermaphrodite, fracture du tibia; flux et reflux de la mer.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

Causse, imprimeur-libraire du Parlement et de l'Académie, place Saint-Etienne. Vol. II, le même et Lejay, rue Saint-Jacques, Paris.

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

Protecteur: le prince de Condé. Cinq directeurs, chancelier, vice-chancelier; académiciens honoraires résidents et non-résidents (Buffon, Voltaire, d'Argenson, Boufflers); pensionnaires; associés ordinaires; non-résidents (Greuze, Cazotte); secrétaire perpétuel; bibliothécaire.

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

Préface: on conserve des registres seulement depuis 1761; on a recueilli ce qui s'est conservé mais qui porte des dates discontinues. On suivra l'exemple de l'Académie française avec la division en deux rubriques. Publication d'ouvrages entiers par ordre chronologique. On citera aussi des articles provenus d'autres Académies.

Dédicace au prince de Condé.

Fondée en 1725, c'est une des nombreuses Académies pré-encyclopédiques. Condé comme protecteur, avait forcé la main au comte de Saint-Florentin, pour délivrer les lettres patentes. Elle décerne des prix en morale, médecine et physique tous les ans. Dans l'histoire hagiographique de l'Académie, on s'excuse d'en avoir accordé un à Rousseau «auteur trop célèbre et trop infortuné» (XXVII). Tous les académiciens ne se sont pas laissés séduire par ce dangereux écrivain et on espère que les lecteurs ne rejetteront pas le blâme sur l'Académie entière, qui ne compte plus aucun des membres qui couronna Rousseau...

Contenu réel: malgré la division en deux rubriques, ce qui l'emporte, ce sont les sciences naturelles. Sujets: histoire d'un météore igné de 1761; essai sur l'origine des terres et pierres, cause physique du déluge; génération des champignons; inoculation; la grêle; les aimants artificiels; essai sur l'opération de la taille; augmentation de poids des métaux; fracture des os; écoles de dessin et leur utilité; l'hermaphrodite; mercure; effervescence froide; sonnette à enfoncer les pilotis; bonne chère chez les anciens; flux et reflux de la mer; peine de mort; habillement des troupes. Mais il y a, à côté de cela, des sujets comme: héroïsme des femmes; origine du respect que dans l'Antiquité la plus reculée on a eu pour les cornes; éloges d'académiciens morts; on n'oublie pas l'histoire locale: essai sur le siège de Dijon en 1513, ode sur les grands hommes de Dijon, plan d'un camp romain de la région, nom et ancienneté de Dijon. Les morceaux de poésie sont assez fréquents: un discours de remerciement; gain à la loterie, etc.

Tables chronologiques au début de chaque volume; par matières à la fin.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

B.N., R 14937-14938.

Bibliographie

Roche D., Le Siècle des Lumières en province: académies et académiciens provinciaux, 1680-1789, Paris, 1978.

Historique

L'Académie de Dijon avait des ambitions pédagogiques; elle voulait compléter la culture des collèges par un enseignement technique. On organisait des cours, un laboratoire de chimie. L'amphithéâtre d'anatomie de Dijon devint un des centres scientifiques de haute réputation. «Dijon se distingue par une pratique très hiérarchisée de son recrutement et dont un bon nombre d'honoraires auraient trouvé place parmi les ordinaires dans la majorité des académies» (Roche, 191). Son recrutement dépassa la centaine et l'académie bourguignonne peut prendre place parmi les sociétés ouvertes.

Auteur

Additif

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s): La publication des Mémoires reprend, après dix ans d’interruption, avec les Nouveaux mémoires de l’Académie de Dijon pour la partie des sciences et des arts (1782-1785, 8 tomes en 4 volumes). Même dédicace au Prince de Condé, même libraire, même périodicité semestrielle, tomes de 250 p. environ. Un nouveau privilège est accordé le 12 février 1783 ; des approbations sont accordées par deux commissaires de l’Académie, la dernière étant datée du 18  juin 1786. La collection de l’Université du Michigan comprend trois années complètes, l’année 1783 est absente, mais un avis en tête du 2e semestre 1785 confirme qu’il s’agit bien du huitième de la série.

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables: Peu de changements dans le contenu, hormis le fait qu’il s’agit uniquement de sciences et d’arts ; les belles-lettres ont disparu. On note un intérêt constant pour la chimie (nombreux articles de Morveau), pour la médecine (articles de Maret), l’histoire naturelle, la géologie et pour certains sujets d’actualité comme le creusement des canaux (entre Saône et Loire), la construction des hôpitaux, l’inhumation des cadavres. Une rubrique importante, en fin de semestre, est consacrée à la météorologie, aux statistiques d’état-civil, aux épidémies ; cette rubrique, due à Maret, est nommée «histoire noso-météoro-logique».

Auteur additif

Titre indexé

MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE DE DIJON *

Date indexée

1769
1770
1771
1772
1773

LETTRES HOLLANDAISES 2

0828
1779

Titre(s)

Lettres hollandaises ou Correspondance politique sur l'Etat présent de l'Europe, notamment de la République des sept provinces unies.

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

Trois tomes, tous datés de 1779. Hebdomadaire. Avis: «Il paraîtra régulièrement une feuille par semaine des Lettres que nous donnons aujourd'hui au public et 18 feuilles formeront un volume».

Description de la collection

T. I, 433 p. (manquent 4, 6, 8-13); t. II, 436 p. (manquent 9 et 10); t. III, 48 p.

Cahiers de 24 p. in-12, 110 x 190.

Devise: elle est variable, souvent prise chez Horace ou Juvénal. On trouve d'abord: Dicere verum qui vetat. Horace. Puis, Felix qui potuit rerum cognoscere causas, qui était la devise de l'Observateur français à Londres et qu'on retrouve dans l'Observateur à Amsterdam.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

«A Amsterdam, et se trouve chez les principaux libraires d'Europe.»

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

DAMIENS DE GOMICOURT.

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

Contenu annoncé: correspondance politique, et il s'agit en effet avant tout de politique. Informations et commentaires sur la guerre en cours et ses répercussions dans les relations entre la France, l'Angleterre, la Hollande et les Etats-Unis. Propagande pour la France, contre l'Angleterre et contre le Stathouder qui devait rester neutre.

Table dans le premier volume, p. 424-433, qui reprend, paragraphe par paragraphe, à la suite, le résumé publié au début de chaque lettre.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

B.N., M 29083-29085.

Bibliographie

D.P. 2, art. «Damiens de Gomicourt».

Correspondance politique sur les affaires présentes, 1782, livraison 11. On y trouve une analyse sévère des Lettres hollandaises, «pamphlet incendiaire».

Historique

Ce périodique qui suit dans la même année L'Observateur français à Amsterdam, ne se réclame pas de sa continuité. Il choisit un autre rythme et ne donne que des nouvelles. Le ton de ses commentaires rappelle celui de Genet, dans les Affaires de l'Angleterre et de l'Amérique qui paraît encore en 1779. Cela confirme notre hypothèse (voir la notice de L'Observateur français à Londres), d'une visée et d'une source communes. Toute la suite des Lettres est une propagande pour la France contre l'Angleterre et contre le Stathouder qui favorise l'Angleterre. C'est donc en effet un pamphlet, mais peut-être moins «incendiaire» que le dit la Correspondance politique. Le journal fut éphémère, il semble n'avoir eu qu'une trentaine de numéros. Et les Nouvelles Lettres hollandaises, du même auteur, qui reprennent le titre et la formule, ne paraissent qu'en 1781.

Additif

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables: La collection est jusqu’au bout composée de lettres hebdomadaires, complétées par des lettres de lecteurs et des réponses développées. Il s’agit jusqu’à la fin d’une publication politique et polémique qui défend le point de vue français contre l’Angleterre. Dans les derniers volumes, l’intérêt se porte sur les colonies anglaises et la guerre américaine.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares: La New York public Library possède une collection presque complète de ce périodique. Seul manque le tome IV, suppléé sur le G.U. par un exemplaire de la bibliothèque de Gand. On constate que le journal de Damiens de Gomicourt a poursuivi son existence jusqu’en 1781, et compte au total 8 tomes ou volumes.

Auteur additif

Titre indexé

LETTRES HOLLANDAISES 2

Date indexée

1779

LE JOURNAL UNIVERSEL 2

0787
1743
1748

Titre(s)

Le Journal universel ou Mémoires Pour servir à l'Histoire Civile, Politique, Ecclésiastique et Littéraire Du XVIIIe siècle.

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

Janvier 1743 - décembre 1748. 16 volumes.

6 mois par tome en 1743; ensuite 4 mois par tome, sauf pour le t. XVI.

Description de la collection

Recueil à pagination continue par tome. — 1743: t. I, ex. Ars., 742 p.; ex. Munich, 8-744 p.; t. II, ex. Ars., 744 p.; ex. Munich, 730 p. — 1744: t. III, 604 p.; t. IV, ex. Ars., 600 p.; ex. Munich, 600-[24] p.; t. V, ex. Ars., 566-[24]-8 p.; ex. Munich, 566-[16] p. — 1745: t. VI, 584-[14] p.; t. VII, 557-[23] p.; t. VIII, 636 p. — 1746: t. IX, ex. Ars., 612 p.; ex. Munich, 287 p. (mois de janvier et février seulement); t. X, 575-[1] p.; t. XI, 576 p. — 1747: t. XII, ex. Ars., 576 p.; ex. Munich, 584 p.; t. XIII, 568 p.; t. XIV, 576 p. — 1748: t. XV, 600 p. (janv.-mai).; t. XVI, 708 p. (juil.-déc).

24 p. par cahier, 73 x 130, in-12 (ex. Ars).

Sur le titre, devise latine renouvelée à chaque tome.

Vignette gravée au titre représentant la Victoire assise sur un écu monogramme. T. I à VIII (ex. Ars.); t. IX à IX (ex. Munich).

Marque à la sphère. T. X-XI. Déjà sur la page de titre d'avril 1746 dans l'ex. Ars., t. IX.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

La Haye. L[aurent] Berkoske le fils. Ex. Ars., t. I-VIII, janv. 1743 - déc. 1745. Ex. Munich, t. I-IX, janv. 1743 – févr. 1746. Ajout au t. I (févr. 1743): on le trouve aussi à Liège chez de Lorme de La Tour. Ex. Munich. Ajout au t. IX (févr. 1746): et se trouve aussi chez N. Wilkens, libraire dans le Jong. Poulof-steeg à Amsterdam.

Amsterdam. Au verso du titre, t. IX (janv. 1746): signature autographe de l'éditeur.

Prix du numéro augmenté à 6 s. en janvier 1744 à cause d'une sixième feuille d'impression supplémentaire (Avert.). Berkoske fit faillite en 1746 (Kossman, p. 25).

Utrecht, Arn. Lobedanius. Ex. Ars.: t. IX-XI, 1746; ex. Munich: t. X-XI, mai-déc. 1746. A la fin du n° de mai 1746: catalogue de l'éditeur.

Amsterdam. Gerrit de Groot et J. Ryckhoff junior, t. XII-XIV. Annonce du changement de libraire, par un «accident imprévu» (Avertissement, janv. 1747).

Amsterdam. J. Ryckhoff junior, t. XV-XVI. 5 s. et demi le numéro en mars 1748 (Vrai Patriote, avec liste des diffuseurs).

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

Rédacteur: Pierre QUESNEL, sous le pseudonyme de Pierre Bénard (G.H., p. 100; Kossman, p. 25; Kleerkooper, t. I, p. 465; Feller; B.Un.; D.P. 2)

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

T. I, Préface: «notre intention n'est pas de n'y insérer rien qui ne soit absolument nouveau ou qu'on ne trouve nulle part ailleurs» (p. 3). «Hé! quel temps fut jamais en effet plus fécond en événements curieux et en révolutions intéressantes» (p. 10). Les belles-lettres «fourniront de quoi divertir l'attention de mes lecteurs, réflexions affligeantes que la lecture des deux premiers articles [politique et ecclésiastique] pourrait leur faire naître» (p. 12).

Contenu réel: 1) «Histoire civile et politique» classée géographiquement; 2) «Histoire ecclésiastique» classée par pays; 3) «Histoire littéraire. Mémoires et nouvelles littéraires et académiques». Ordre de 1) et 2) interverti à partir de février 1744. Art. 2 et 3 regroupés en «Histoire ecclésiastique et littéraire» à compter de février 1746.

Centres d'intérêt: politique, jansénisme, littérature.

Principaux auteurs: (t. I) Marivaux, Rousset de Missy, Voltaire (Lettre, Best. D2723), Bignon, Fréron, Prévost, Saint-Pierre, Lenglet-Dufresnoy; (t. II) Lenglet-Dufresnoy, Quesnay, Bruzen de La Martinière, Saint-Martin de Chassonville, P. du Halde, Voltaire, Moncrif, Reinbech; (t. III) Guyot Desfontaines, d'Argens, Chorier; (t. IV) Celsius, Barbeyrac, Bossuet, Hobbes, P. Etienne Souciet, Francheville, Pope; (t. V) Richer, Fréron, Hermilly, Massillon, Rousset de Missy, Spinoza; (t. VI) Moncrif, Fréron, Charlevoix, d'Argens, Hermilly, Maupertuis, Rousset de Missy, Voltaire; (t. VII) Pecquet, Duclos, Maffei; (t. VIII) Chaulieu, Voltaire, d'Argens, Nollet; (t. X) Voltaire, Hatzfeld, Cervantès, Ch. Coypel, Picart le Romain, Bossuet, Mme du Châtelet; (t. XI) abbé Rousseau, Prévost, Fr. Parfaict; (t. XII) Voltaire, J.-B. Rousseau, Duclos, Batteux, P. Lafitau, La Chesnaye-Desbois, Réaumur; (t. XIII) Nollet, Bouhier.

Rapports avec d'autres périodiques: juin 1745, polémique avec une «gazette française qui se débite en Allemagne» (peut-être la Gazette de Cologne novembre 1745: compte rendu de La Critique du siècle (La Haye, hebdo).

En fin de tome, errata et tables spécialisées par section du périodique.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

Sächsische Landesbibliothek, Dresde, H. univ. B. 822 (16 t., manque juin 1748; «e Bibliotheca Böttigeri»: Karl August Böttiger, 1760-1835, archéologue et directeur du Musée de sculpture de Dresde); Ars., 8° H 26346 (13 t. en 14 vol. jusqu'à août 1747; annotations ms., Paulmy?); Bayerische Staatsbibliothek, Munich, 8° Eph. pol. 51 (t. I-XIII, manque t. VI; anciennement un t. XIV, sept. 1747, sous la cote: 8° eph. lit. 125). Autres exemplaires: B.R. La Haye (t. I-VIII); B.U. Halle (t. II, V-VII, IX-XVI).

Bibliographie

B.H.C., 59, 90; H.G.P., t. I, 287, 295; G.H., p. 203-204. Mentions dans la presse hollandaise (cf. Kossman, p. 25); L'Avocat pour et contre (Rousset de Missy), 1746, t. II, n° III, 1er août, p. 20 (polémique autour du numéro de juin); Le Vrai Patriote hollandais (Rousset de Missy), 1748, t. II, p. 47 (le même auteur poursuit le Journal chez Ryckhoff). — Kleerkooper M.M., et Stockom W.P. von, De Boekhandel te Amsterdam, La Haye, 1914, t. I, p. 464-467 (Lettre de «Pierre Benard» à Jean Néaulme, du 4 avril 1746). — Kossman E.F., De Boekhandel te 'S-Gravenhage, La Haye, p. 25-26. — Mattauch H., Die literarische Kritik der frühen französischen Zeitschriften (1665-1748), Munich, 1968, p. 319. — Couperus, p. 191.

Historique

Jusqu'à présent, l'auteur de ce périodique était resté mystérieux, bien que Hatin en citât incidemment le pseudonyme (G.H., p. 100): Pierre Quesnel, alias P. Bénard, résidant en Hollande et plus précisément à Vianen au printemps 1746, appartenait à l'émigration janséniste française; il est connu par de rares ouvrages dont une Histoire de la Compagnie de Jésus mais il semble avoir volontiers prêté sa plume à des entreprises d'édition (voir sa lettre à Jean Néaulme, Kleerkooper), dont peut-être L'Eloge de l'Enfer et, sûrement mais jamais signalé, aux Principales Aventures de l'admirable Don Quichotte (de Hondt, 1746: voir J.U., août 1746, p. 457). Il dirigea de bout en bout Le Journal universel, malgré des difficultés notables: faillite en 1746 de son premier éditeur Berkoske (Kossman, p. 25), fonds (300 florins) dont celui-ci lui resta redevable (Kleerkooper, p. 465), tentative que fit Berkoske de le remplacer par Jean d'Agneaux (Kossman, p. 25), nécessité pour Quesnel de trouver un nouveau libraire à Utrecht (Kossman corrige G.H., p. 203). Diverses plaintes dont celles de l'ambassadeur de Russie, comte Polofkine (pour le numéro d'octobre 1745) (Kossman, p. 25; G.H., p. 100) expliquent en partie la vie assez mouvementée de ce périodique édité successivement à La Haye, Utrecht et Amsterdam (Quesnel accuse les libraires hollandais de ne pas savoir travailler: août 1744, errata.Les collections relativement importantes en sont rares.

Le J.U. est une excellente publication, élégamment écrite et fort bien informée. Bien que se disant las des «guerres civiles» religieuses, ce périodique est fondamentalement janséniste, tout en se méfiant du courant mystique des «énergumènes de Saint-Médard» (août 1743). Souvent, le J.U. est une version abrégée des Nouvelles ecclésiastiques: polémiques religieuses, particulièrement dans le sud de la France et dans les Pays-Bas autrichiens. Politiquement, bien que se défendant d'être anti-français, le J.U. est fasciné par l'Angleterre et son «amour de la liberté et du bien public» (mai 1746). Les nouvelles proprement littéraires sont peu nombreuses; Quesnel y voit pourtant un utile contrepoids aux lassantes affaires politiques et religieuses (janv. 1743, Préface). Il exprime pourtant ses antipathies, pour Voltaire (mars, nov., déc. 1743), et ses amitiés, pour Prévost (mai 1743), Lenglet-Dufresnoy (juin-juil. 1743) ou d'Argens (févr. 1743, nov. 1745).

Quesnel a le sentiment que la littérature est en décadence depuis le XVIIe siècle (janv. 1743). Il suit pourtant avec un esprit critique toujours éveillé les productions de la Compagnie de Jésus dont il se fait l'historien minutieux, et à l'occasion nuancé.

Le J.U. n'exprime pas le sec manichéisme habituel aux ouvrages jansénistes: il ne recule pas devant les grâces de l'expression, l'humour et même la possibilité concédée à l'adversaire de ne pas avoir toujours tort.

Additif

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s): Le Leidse courant publie, en date du 4 et du 9 janvier 1743, l’annonce suivante:

«Arnaut Lobedanius à Utregt ayant pris toutes les mesures pour avoir des nouvelles sûres, fraiches et intéressantes, de tout ce qui se passe en Europe, donne avis qu’il imprime une gazette française d’Utregt, qui paraitra régulièrement deux fois par semaine, savoir le lundi et le jeudi, et le supplément le mardi et le vendredi. La première se débite actuellement; ceux qui désirent de se la procurer pourront le faire à un prix raisonnable. Ledit libraire s’en rapporte au public éclairé afin de décider de la [sic] mérite de sa gazette, il supplie simplement de lui faire la grâce de la lire avec un esprit impartial et de bien examiner les nouvelles qu’elle renferme; alors il ose se flatter d’avoir son approbation. Cette gazette se trouve chez les libraires, à Amsterdam chez Ryckhoff le fils, à La Haye chez N. Blommendal, à Rotterdam chez Smithoff, à Leide chez J. van Abcoude, et chez Mrs les directeurs du bureau général des postes de toutes les principales villes de l’Europe. Le prix des avertissements sera très raisonnable».

Cette annonce belliqueuse désigne probablement un Journal universel destiné à faire pièce à celui de Berkoske (D.P. 1, n°787). Cette revue, annoncée dans le Leidse courant du 4 février 1743, devait paraître régulièrement le premier de chaque mois jusqu’en 1748. Son auteur, Pierre Quesnel, pouvait même se flatter de son succès en février 1744, et annoncer des suppléments. Pourtant, il entra en conflit avec son éditeur, Berkoske, à la fin de 1745; c’est alors qu’il confia son journal à Lobedianus (voir F. Moureau, D.P. 2, n° 662, «Quesnel, Pierre»). Cette trahison devait mettre en fureur Berkoske, qui dénonce son rival dans le Leidse courant du 9 mars 1746:

«L. Berkoske fils, libraire à La Haye, ayant vu que le nommé Lobedanius, libraire à Utrecht, a annoncé dans la GAZETTE D’UTRECHT contre tout droit et toute honnêteté, qu’il distribuera à l’avenir, régulièrement le premier de chaque mois, le JOURNAL UNIVERSEL, ledit L. Berkoske se trouve dans l’obligation d’avertir le public qu’il ne reconnait aucun JOURNAL UNIVERSEL véritable, que celui qui a été imprimé et distribué par lui, depuis janvier 1743 jusqu’à présent; et afin d’empêcher le public de s’en [laisser] imposer par cette CONTREFACTION, ledit Berkoske avertit de plus que le VERITABLE JOURNAL UNIVERSEL qu’il est en possession depuis trois ans d’imprimer et de distribuer, sera désormais signé de sa propre main, et qu’on pourra d’ailleurs le reconnaître à la vignette du titre, qui représente une Renommée, assise sur une nue, sonnant de la trompette qu’elle tient de la main droite et en avant de la gauche sur un écusson».

C’est pourtant bien chez Lobedianus, devenu le «véritable auteur», que paraît le Journal universel de mai 1746: «A. Lobedanius, libraire à Utrecht, imprime et débite actuellement LE JOURNAL UNIVERSEL, pour servir à l’Histoire civile, politique, ecclésiastique et littéraire du XVIII siècle pour le mois d’avril. Cet ouvrage étant du véritable auteur, paraitra régulièrement, comme depuis trois ans, les premiers jours de chaque mois; on le trouve à La Haye chez Blommendaal, à Rotterdam Smithoff et Burgvliet, à Middelbourg Meerkamp, à Dord van Braam, à Amsterdam la veuve de Coup, Kuyper et Esveldt, à Leide chez les frères Verbeek et B. van der Aa etc.». L’année suivante, la revue est transférée à Amsterdam, chez de Groot et Ryckhoff jeune, sans qu’on sache la raison de cette dernière négociation.

Auteur additif

Titre indexé

JOURNAL UNIVERSEL 2

Date indexée

1743
1744
1745
1746
1747
1748

JOURNAL LITTÉRAIRE DE NANCY

0762
1782
1787

Titre(s)

Journal littéraire de Nancy. Continuation du Journal de Nancy (1779-1781).

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

Janvier 1782-décembre 1787. Hebdomadaire. 24 tomes ou volumes.

Description de la collection

Même présentation que le Journal de Nancy, dont le Journal littéraire continue la tomaison: 1782, t. VII-IX; 1783, t. X-XII; 1784, t. XIII-XIV; 1785, t. XV-XVII; 1786, t. XVIII-XX; 1787, t. XXI-XXIV.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

Nancy, chez Claude Sigisbert Lamort, imprimeur, puis à partir de 1784 (t. XIV), chez H. Haener.

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

André Charles THERRIN.

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

Pièces fugitives, extraits, annonces d'ouvrages nouveaux.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

B.M. Nancy, 784.506.

Bibliographie

Ronsin A., Les Périodiques lorrains antérieurs à 1800: histoire et catalogue, Nancy, 1964, n° 96.

Auteur

Additif

Titre(s): Le Journal littéraire de Nancy est la simple continuation du Journal de Nancy -même format, même périodicité, même libraire, mêmes contributeurs-. Le J.L.N. de 1782 (indiqué «Tome VII») fait suite au tome VI du J.N. (indiqué «Tome VI»). La pagination est continue sur l’année, les volumes font environ 400 pages.

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s): Les approbations du censeur sont données en fin de volume, pour le volume entier: on peut se demander si le journal a été distribué par feuilles bihebdomadaires.

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables: Le contenu est sensiblement le même: beaucoup de petits vers, de logogriphes, d’énigmes, alternant avec des discours académiques, des mémoires scientifiques (histoire naturelle, médecine, géographie, etc.), des discours parlementaires (notamment de Dijon) dans un assez grand désordre. Tout au plus peut-on noter une plus grande importance donnée aux comptes rendus d’ouvrages littéraires, par exemple Les Contemporaines de Rétif de La Bretonne (t. VII), ou Les Délassements de l’homme sensible de Baculard d’Arnaud (t. VIII).

Auteur additif

Titre indexé

JOURNAL LITTÉRAIRE DE NANCY

Date indexée

1782
1783
1784
1785
1786
1787

JOURNAL GÉOGRAPHIQUE

0740
  ?
1774  ?

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

En vente chez Couret de Villeneuve, libraire à Orléans: 12 vol. parus (Affiches de l'Orléanais, 2 déc. 1774, p. 222). Non retrouvé.

Auteur

Additif

Titre(s): Journal géographique et historique.

Le véritable titre était: Description géographique, historique et physique de l’univers, en forme de journal; mais il semble que cet ouvrage n’ait pas paru assez longtemps pour devenir périodique.

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s): «à commencer du 1er octobre 1774». Le seul numéro connu (BnF, G-9133) est daté de janvier 1775.

Description de la collection: «Cet ouvrage périodique se fera par parties détachées, mais dont les feuilles, étant rassemblées, fourniront le corps de géographie le plus intéressant et le plus complet qui ait encore paru. On donnera tous les mois un Cahier de ce Journal contenant 5 feuilles in-8°. Le prix de la souscription est de 12 livres pour l’année, rendu franc de port aux Souscripteurs de Paris, et de 18 livres pour la Province».

Edition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s): «On souscrit à Paris chez Cailleau, Imprimeur libraire, rue Séverin».

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s): «Un homme de lettres savant et laborieux».

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables: La géographie étant absolument nécessaire aux lettrés, aux politiques, aux officiers, à tous ceux qui lisent les histoires «et même la gazette», on donnera «un Journal qui réunisse tout ce qu’il y a de plus intéressant pour la Géographie, tant par rapport aux lieux que par rapport à l’Histoire civile et naturelle, aux Curiosités qui s’y trouvent, au Commerce qui s’y fait, et aux événements mémorables qui s’y sont passés. Cette méthode aura cela d’avantageux qu’elle mettra le Lecteur en état de s’instruire en très peu de temps et sans beaucoup d’application».

La première livraison (80 pages) est composée d'un Avant-propos, d'un Introduction à la géographie en 12 chapitres et d'une description du royaume de Suède

 

Bibliographie : le prospectus est annoncé dans la presse en 1774 (Année littéraire, IV, p. 311-315; Journal encyclopédique, septembre, p. 541-542; Journal des Beaux-Arts, octobre, p. 143-145; Affiches de Montpellier, 7 novembre).

La Suite de la clef (février 1775, p. 115) annonce la parution du premier cahier. La Bibliothèque universelle des voyages (Paris, 1808, t. II, p. 337 ou t. III, p. 217) citera un cahier (le 2e ou le xe) daté de 1788.

Auteur additif

Titre indexé

JOURNAL GÉOGRAPHIQUE

Date indexée

1774
1775