LE MERCURE

Numéro

0923

Titre(s)

Le Mercure de [juin-juillet, août, etc.].

Continuation du Nouveau Mercure (1717-1721), de Buchet. Continué par le Mercure de France (1724-1744), de La Roque.

Titre indexé

MERCURE

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

Juin-juillet 1721-décembre 1723. 32 livraisons mensuelles ; plusieurs suppléments sont donnés chaque année en volumes séparés (cf. Journal du siège du fort de Montreuil en sept. 1722 et Journal du voyage du Roi à Reims en oct. 1722). Numéros doubles en juin-juillet 1721, mars, mai, sept., nov. 1722, déc. 1723. Privilège en date du 3 juillet 1721, registre le 4 juillet, au nom des «Sieurs Du Fresny, De La Roque et Fusellier» pour douze années consécutives. Les approbations sont données pour chaque livraison, entre le 1er et le 6 du mois qui suit, avec une grande régularité (approbation du 2 août pour le tome de juin-juil. 1721, du 3 sept, pour la livraison d'août, etc.).

Description de la collection

Les tomes mensuels sont reliés séparément ou par deux suivant les collections. On compte 8 livraisons pour 1721, 12 pour 1722 et 12 pour 1723. Chaque livraison est composée de 8 ou 9 cahiers de 24 p. in-12, 95 x 160 (118 x 180 non rogné), comprenant au total de 192 à 216 p. Modification de typographie en septembre 1721 ; pagination continue semestrielle à partir de septembre 1723.

En janvier 1722 apparaît sur la page de titre le Mercure au caducée, avec la devise : Quae colligit spargit. On trouve dans chaque volume des chansons notées, des médailles, des jetons, parfois des plans.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

Paris. «Chez Guillaume Cavelier, au Palais. La veuve de Pierre Ribou, Quai des Augustins, à l'Image S. Louis. Guillaume Cavelier fils, rue S. Jacques, à la Fleur-de-Lys d'Or. André Cailleau, à l'Image Saint André, Place de la Sorbonne». En mars 1722, la veuve de Pierre Ribou est remplacée par Noël Pissot. Cailleau disparaît de l'association en septembre 1723.

«De l'Imprimerie de C.L. Thiboust, Place de Cambrai» jusqu'en juin 1723, puis J.-B. Lamesle.

Prix : 25 s. jusqu'en octobre 1721, 30 s. ensuite (numéro double de juin-juil. 1721 à 40 s.).

La revue est distribuée dans une cinquantaine de villes françaises et étrangères ; la liste des libraires est donnée régulièrement.

La différence de privilège est marquée par le siège de la revue : «L'adresse générale pour toutes choses sera à Monsieur Moreau, Commis au Mercure, chez Monsieur le Commissaire le Comte, vis-à-vis la Comédie-Française à Paris». Les exemplaires restants des Mercures de Buchet sont vendus chez les frères Buchet.

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

Charles DUFRESNY, Louis FUZELIER et Antoine de LA ROQUE, tous trois détenteurs du privilège ; mais Dufresny ne semble pas avoir joué de rôle dans la rédaction, dont La Roque fut très probablement le responsable unique : «Tout l'ouvrage tomba sur le chevalier de La Roque», écrit Gersaint (cité par F. Moureau dans S.M. et dans D.P. 2). Il fut aidé par son frère Jean de La Roque, qui se chargea probablement des articles d'archéologie, de numismatique et d'orientalisme. Fuzelier tint la rubrique des spectacles (cf. Mercure de janv. 1749, cité dans D.P. 2, art. «Fuzelier»). Moreri (art. «Roque») mentionne la collaboration de Pellegrin pour les extraits de pièces, de Houx de Lavau pour les généalogies. P. Lacroix cite d'autres auteurs d'articles divers : Dom T. Duplessis, Boucher d'Argis, le père Texte, Dreux Du Radier. Les papiers Fuzelier (A.N., AJ13 1034-13) donnent la liste de 13 collaborateurs et de 15 contacts : «Chez le Ministre» [Maurepas] (15 noms), «Pour les pays étrangers» (18 noms, dont celui de Madame Palatine) ; à la «Marine» (7 noms).

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

L'Avertissement en tête du numéro de juin-juillet 1721 insiste sur les conséquences de cette responsabilité collégiale. Plus de transitions à l'intérieur d'un numéro homogène, mais une juxtaposition d'articles, en vue d'une «commode répartition du travail» : «Le choix des transitions, souvent absurdes, presque toujours forcées dans un ouvrage qu'on n'a jamais le loisir de limer, n'est qu'une délicatesse inutile qu'il faut rejeter entièrement du Mercure, aussi bien que le style épistolaire qu'il a si longtems affecté» (p. V). Le Mercure sera donc plus que jamais divers ; il sera le «Secrétaire perpétuel des Arts et des Sciences», le «confident des Muses», l'«agent infatigable de l'Histoire» (p. IX) : «Chacun dans le Mercure apprendra les mouvements de la sphère qui l'intéresse. Celui qui n'aime que le bien de sa Patrie s'instruira de sa destinée dans la suite des nouvelles étrangères et politiques ; celui qui n'aime que son propre bien connaîtra l'état de ses affaires par l'ordre suivi des édits, arrêts et déclarations ; le savant et le curieux découvriront le progrès des lettres et des arts dans les dissertations, les titres et sujets des livres qui s'impriment journellement, et les descriptions des ouvrages nouveaux des peintres, sculpteurs et architectes ; l'amant verra peut-être dans les poésies et les historiettes modernes la décadence de l'empire de l'Amour...».

Des rubriques plus ou moins régulières sont néanmoins prévues : «Nouvelles galantes, Politiques et Littéraires», travaux des Académies, thèses des «quatre Facultés» (p. XI), musique et peinture - auxquelles La Roque semble attacher une importance particulière. On insiste en même temps sur la neutralité du journal. L'Avertissement en tête du numéro de juin 1723 rappellera que le Mercure est essentiellement composé de pièces et de mémoires envoyés par les lecteurs ou les auteurs : «Dans les pièces qui contiennent la Critique ou l'Apologie de quelque ouvrage d'esprit, on doit considérer que ce n'est presque jamais nous qui parlons» (p. IV).

Sous la direction de La Roque, la revue tend à s'équilibrer entre une partie informative et sérieuse, et une partie de pur divertissement. On trouve dans la première partie des pièces, mémoires, récits de voyages, dissertations érudites, bonnes pages d'ouvrages à paraître, «Journal de Paris», «Nouvelles étrangères», «Nouveaux Edits du Roi, Déclarations, Lettres Patentes et Arrêts du Conseil d'Etat», analyses théâtrales, etc. ; dans la seconde, des pièces fugitives, des bouts-rimés, sonnets, sixains, chansons, airs à boire, énigmes, épîtres, anecdotes de «galanterie permise» (Avertissement, juin 1723). La partie sérieuse du Mercure tend à se structurer autour de rubriques plus ou moins stables : «Nouvelles littéraires et des Beaux-Arts», «Articles des Nouvelles dramatiques des Spectacles» (juin 1723), «Article des Edits, Déclarations, Lettres Patentes», «Morts de France», «Mariages», «Dignités et Charges» (juil. 1721).

L'intérêt principal du Mercure continue de résider dans la chronique théâtrale, accompagnée de longues analyses des principales pièces : Belphégor «ou la destinée d'Arlequin aux Enfers» (sept. 1721), Œdipe (déc. 1721 et janv. 1722), La Double Inconstance et Inès de Castro (avril 1723) ; on y trouve également une série d'articles, souvent très critiques, sur le théâtre anglais, à partir d'avril 1722. L'analyse se fait relativiste par des projets d'histoire des théâtres français, italien, espagnol (juin 1722, mai et août 1723), peut-être conçus par A. de La Roque (cf. son Histoire des spectacles anciens et modernes annoncée par Camusat, t. II, p. 231) et par les frères Parfaict, bien que ces derniers se soient défendus plus tard d'avoir sollicité des mémoires (Histoire du théâtre français, préface, t. I, p. X, note a). D'autre part, le Mercure tend à augmenter sa partie «gazette» : le «Journal de Paris» rend compte de la chronique de la Cour et de la Ville, avec parfois de longs développements : sur l'arrestation de Cartouche en octobre 1721, sur les feux d'artifice (mars 1722), les processions, la maladie du Régent (mai 1722), la première communion du Roi ou son sacre à Reims ; les «nouvelles étrangères» tendent à prendre la forme d'une suite de bulletins des grandes capitales. D'une façon générale, la revue a étendu largement son domaine d'intervention et s'est faite plus cosmopolite. L'Avertissement de janvier 1722 le dit ouvertement : «Nous aurons toujours une prédilection particulière pour les Relations qui nous viendront des Pays étrangers, soit que cela regarde la Politique, les Sciences, les Arts, etc.» (p. 4).

Poètes publiés : Moncrif, Piron, Voltaire et de nombreux pères jésuites. Auteurs cités : Marivaux, La Motte, Racine, Montesquieu, Gueullette, Bayle, le père Porée, Villon, Brueys et Palaprat, le P. Lafitau. Artistes cités : Watteau, Callot, Antoine Coypel.

Historique

Charles Dufresny avait obtenu, le 1er juin 1721, un brevet de don du Mercure, qui équivalait à une sorte de pension (voir Moreri, art. «Fresny»). Il exploita ce brevet par un privilège en bonne et due forme, partagé avec La Roque et Fuzelier le 3 juillet. Par acte passé devant le notaire Langlois le 9 juillet, il s'engageait à ne pas céder son tiers de privilège sans accord avec ses associés, dont il recevait en retour une pension de 1000 £ (D.P. 2, art. «Dufresny»). C'est à La Roque qu'il revint de rassembler une équipe d'«amis savants, judicieux, éclairés» pour étayer la rédaction (Avertissement, juin-juil. 1721). Parmi ces collaborateurs de La Roque, on peut compter surtout Fuzelier et Pellegrin, qui donnèrent à la partie Spectacles une remarquable régularité. Antoine de La Roque donna, de son côté, une importance nouvelle à la rubrique des Beaux-Arts : éloge de Watteau, août 1721, ou de Coypel, mars 1722, catalogue de la collection du duc d'Orléans, févr.-avril 1722. Les rédacteurs du Mercure avaient affirmé chercher la neutralité en s'engageant moins délibérément dans le clan des Modernes ; ils continuent néanmoins d'apporter leur approbation au Spectateur français de Marivaux (5e et 6e feuille, mai 1722) et à La Motte (analyse d'Inès de Castro en avril 1723 et extraits des critiques en juillet). Mais par l'intérêt porté à tous les aspects de la vie culturelle, par le souci de l'information exacte dans tous les domaines et par son ouverture sur le monde extérieur (province et étranger), le Mercure de La Roque trouva une assise solide et connut un succès durable. En janvier 1724, Antoine de La Roque prit définitivement la tête du journal, auquel il donna le titre de Mercure de France, et il obtint en octobre 1724 un privilège exclusif qu'il garda jusqu'à sa mort en 1744.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

B.N., 8° Lc2 38, 8° Lc2 39bis, 8° Lc2 44bis, Per. Microf. D.1. ; Ars. (deux collections) ; Sorbonne, HJj 2 ; Inst. ; Maz. ; B.A.A., 148 T 1 ; B.M. Lyon, Aix, Grenoble, etc. Exemplaire aux armes de la marquise de Pompadour à l'Ars. (Olivier, Pl. 2399).

Bibliographie

Voir la bibliographie du Nouveau Mercure.

Mention dans Gacon, F., Le Secrétaire du Parnasse et Suite, 1724, dans Marais, Journal et Mémoires, Paris, 1864, t. II, p. 168 (22 juin 1721).

«Catalogue des Mercure de France depuis 1717 jusqu'à présent», p. 64-65 : notices sur La Roque et Fuzelier, B.N., ms. f. fr. 15296. – Gersaint E.F., Catalogue raisonné des différents effets curieux et rares contenus dans le cabinet de feu M. le chevalier de La Roque, Paris, 1745, préface biographique.

– Courcel G. de, «Mémoire historique et détaillé pour la connaissance des auteurs qui ont travaillé au Mercure de France», Bulletin du bibliophile, 1902, p. 308-310, 406, 528.

– Orlando V., «Louis Fuzelier, critico drammatico al Mercure de France», Bibliotecca teatrale, Rome, n° 13. – Moureau F., Un singulier Moderne : Dufresny (S.M.), Lille et Paris, Champion, 1979.

Date indexée

1721
1722
1723