LE POÈTE VOYAGEUR

Numéro

1124

Titre(s)

Le poëte voyageur, ou gazette impartiale des Pays-Bas et des environs, en vers, sans prospectus et sans conditions. Avec des notes en prose (désigné par PV).

Modifications du titre: Le poète voyageur et impartial, ou journal en vers. Accompagné de notes en prose: première page de titre du recueil Capitaine 6715 (1783) (désigné par PVI/jv).

Le poète voyageur et impartial, ou itinéraire en vers. Accompagné de notes en prose: seconde page de titre du recueil Capitaine 6715 (1784) (désigné par PVI/iv).

 

Titre indexé

POÈTE VOYAGEUR

Dates, périodicité, privilège(s), approbation(s)

Dates extrêmes de publication: 1781 (PV) ; 1er novembre 1783 – 15 avril 1784 (PVI); 2 volumes. Deux Prospectus figurent au verso des pages de titre mentionnées ci-dessus. Ils annoncent respectivement la sortie du journal pour le 1er novembre 1783 (PV) et le 1er janvier 1785 (PVI). Rien ne semble avoir paru en 1785. D'autre part, le recueil Capitaine comporte une présentation versifiée, de 17 p., intitulée Prospectus.

Périodicité annoncée: PV, hebdomadaire; PVI/jv, bimensuel; PVI/iv, «Il en paraîtra, tous les mois, 4 numéros d'une feuille d'impression chacun, in-octavo, séparément ou collectivement».

Périodicité réelle: PV, un seul numéro; PVI, bimensuel du 1er nov. 1783 au 15 févr. 1784 (n° 1-8); une seule livraison pour mars-avril 1784 (n° 9-12).

Datation des volumes: PV, 1781; PVI, 1783 et 1784, pour le même contenu du recueil Capitaine 6715.

Description de la collection

Composition du volume: PVI, un tome/vol. en 2 parties et 12 numéros. Nombre de pages: PV, p. (avis du libraire) + 41 p. (et non «27»: erreur de pagination) + 1 p. d'errata; PVI, 17 p. (Prospectus) + 208 p. + 1 p. (Avis de l'éditeur).

Format: PV, in-4°; PVI, in-8°. Dimensions: PV, 130 x 215; PVI, 120 x 210.

Devise: PV, «L'ennui naquit un jour de l'uniformité» La Fontaine (PV) / La Motte (PVI).

Partition encartée entre les p. 178 et 179.

Édition(s), abonnement(s), souscription(s), tirage(s)

PV: Bruxelles-Liège; PVI: Bruxelles-Liège. Editeur: PV Desmaseaux / Desmazeaux (Liège); PVI, Bernimoulin / Bernimolin (Liège). Libraires associés: PVI, Paris, Valade, Didot le Jeune, Bailli le Jeune. Imprimeurs: PV, Desmaseaux; PVI, Bernimoulin.

PV: «On souscrit à Liège chez Desmaseaux et chez le dentiste Bersac. On paie deux sous et demi le numéro, dix sous par mois».

PVI/jv: «On souscrit à Liège chez l'auteur ou l'imprimeur», et «chez M. Maus, officier au bureau des Postes impériales, pour toute l'Allemagne»; à Bruxelles «chez M. Horgnies, expéditeur de gazettes étrangères pour tous les Pays-Bas autrichiens». On annonce que la liste des abonnés figurera dans chaque numéro (!) et celle des souscripteurs «à la fin du premier volume»; listes non parues. Prix annuel de souscription: 15 ou 21 livres de France (selon la qualité du papier). Prix sans souscription: 18 livres pour l'année, 15 sous par numéro.

Fondateur(s), directeur(s), collaborateur(s), contributeur(s)

Fondateur: Jean-Nicolas-Marcelin Guérineau, chevalier de SAINT-PÉRAVI ou Saint-Péravy.

Contenu, rubriques, centres d’intérêt, tables

Contenu:

«Je vais faire le tour du monde,

et, mes tablettes à la main,

journaliste ambulant, voyageur écrivain,

j'exposerai, lecteurs, dans cette mappemonde, 

sous différents côtés, le vaste genre humain,

et tous les travers qu'à la ronde,

je trouve sur mon chemin.

Ma plume décrira les empires, les villes,

depuis Paris jusqu'à Pékin;

mœurs barbares, et mœurs civiles;

police, bâtiments, lois, usages enfin,

depuis le petit pied des Chinoises gentilles,

et le bonnet pointu du grave mandarin,

jusques au court jupon des femmes des Antilles...»

Le Prospectus en vers annonçait encore la peinture, «dans un même tableau», des «secrets de la nature» et un éclairage pittoresque sur l'actualité: «commerce, finance, barreau, cour des princes, agriculture, guerre, emplois»... On pourrait

«... d'un coup d'œil, rassembler, sans lunettes,

et l'érudition de toutes les gazettes,

et l'esprit de tous les journaux.»

Dans cette galerie, pas de place, cependant, pour le «regard frondeur», pour le «coupable sel qui ne plaît qu'aux méchants». Le voyageur critique adopte le profil de l'«auteur décent et délicat et sage». Il dit vouloir «respecter les mœurs et le gouvernement», comme les «augustes mystères» de la religion. «Sur mille abus divers je n'aurai point d'humeur».

Contenu réel: l'entreprise de Saint-Péravi -comme l'annonce bien sa forme en vers- s'apparente en fait au journal de voyage et n'a qu'un lointain rapport avec une feuille d'information. La Gazette impartiale de 1781 est un poème sur Liège, ses mœurs, ses monuments, ses traditions politiques, sa vie intellectuelle. De ce point de vue, la relation est d'ailleurs loin d'être dénuée d'intérêt. Le morceau sera repris et amplifié dans la publication de 1783 (n° 2, 15 nov., p. 19 et suiv.). Celle-ci développe le récit du voyage de Paris à Liège et, à côté de notations sur Cambrai, Valenciennes ou Mons, ajoute des tableaux plus ou moins circonstanciés de Bruxelles, Louvain et Aix-la-Chapelle. La part d'informations touristiques y sera importante (notamment en ce qui concerne les stations thermales, comme Spa ou Chaudfontaine). Ce «journal» vaut surtout en tant que témoignage sur la pénétration des idées nouvelles, en particulier quand il évoque solidairement l'action des véritables gazettes. Il reflète par ailleurs l'affirmation d'un patriotisme liégeois exaltant les traditions démocratiques du pays ou les réussites du moment (Grétry).

Historique

Le Poète voyageur de 1781 se présentait comme un essai «d'un genre neuf, pittoresque et singulier», dans le monde mouvementé de la presse, où l'expérience «nous offre tant de journaux expirés presque au moment de leur naissance». Son sort ne fut guère différent. Une première livraison offrait un tableau de Liège en vers; là résidait l'originalité d'une publication qui s'intitulait Gazette et désirait devenir hebdomadaire «dans le cas de la faveur du public». Celui-ci ne semble pas avoir trop pressé l'auteur de donner une suite au «numéro zéro», malgré ce qu'en dira Saint-Péravi dans le prospectus du Poète voyageur et impartial de 1783, qui reprit le projet sur nouveaux frais:

«Il parut, il y a quelques années, cinq ou six feuillets épars de cet ouvrage, grossièrement imprimés, dont la copie avait été recueillie je ne sais comment par l'imprimeur. Malgré mon attention à faire supprimer cette informe mutilation, je ne pus empêcher qu'il n'en tombât quelque exemplaires entre les mains de quelques gens de lettres de la capitale, entre'autres M. Le-Mierre, mon ami; l'impression avantageuse que leur firent ces lambeaux, tout décousus qu'ils étaient, devint presque générale; aussitôt je fus assailli d'une infinité de lettres les plus pressantes, pour m'engager à publier cet ouvrage en entier, auquel ils avaient l'indulgente bonté de prophétiser le plus grand succès...».

Celui-ci, croyait l'auteur, était garanti par la vogue des «voyages»: sont cités «l'enjoué Bachaumont», Chapelle, Desmahis, Le Franc de Pompignan. «On voit combien ce genre prête à la poésie». Saint-Péravi en persuada l'imprimeur-libraire Bernimolin, qui le logeait. On réutilisa avec économie l'essai de 1781, prestement rafraîchi. On rédigea des prospectus dans les règles, avec correspondants à Bruxelles et Paris... pour une entreprise que son caractère exclusivement local et sa forme même vouaient à l'échec.

Ce qu'il y a de plus vrai dans le Prospectus versifié décrivant la publication de Saint-Péravi – «ce portatif Atlas» – tient dans la comparaison avec une «boîte magique» qui offrirait le spectacle du monde par «une heureuse imposture». Il fallait la brillante expansion de l'industrie liégeoise du livre et sa participation à l'essor de la presse pour illusionner le modeste libraire de la place aux Chevaux et lui faire croire qu'on pouvait vendre sur les quais de la Seine un tel «esprit de tous les journaux». Saint-Péravi «était d'une insouciance singulière», raconte le baron de Villenfagne, qui l'a connu. Sa fonction d'«orateur» de la Société libre d'émulation «était peu propre à lui donner du pain» («c'était pour s'en procurer, ou plutôt pour avoir de quoi boire, qu'il barbouillait du papier chez nous»). Il mit tout son caractère dans une entreprise à propos de laquelle il dit lui-même, avec le réalisme souriant du poète crotté: «La foule des lecteurs ne m'accueillera guère». D'après ce que nous en savons, le journal ne dépassa pas en effet la douzaine de numéros et, comme il se devait, finit par une chanson (les Amours d'Imma et d'Eginhart), domaine où Saint-Péravi, mort discrètement en 1789, garda au moins une certaine renommée par la romance de Lucrèce. La reprise annoncée par prospectus pour janvier 1785 ne semble pas avoir eu lieu.

Localisation(s), collections connues, exemplaires rares

Bibliothèque centrale de la ville de Liège, PV : RP D6678, Cap. 6714; PVI: Cap. 6715.

Bibliographie

Villenfagne H. de, Mélanges pour servir à l'histoire civile, politique et littéraire du ci-devant pays de Liège, Duvivier, 1810, p. 52-57. – Capitaine U., Recherches historiques et bibliographiques sur les journaux et les écrits périodiques liégeois, Liège, Desoer, 1850, p. 95-100. – Leigh R.A., «Rousseau, Voltaire and Saint-Péravy», Studies on Voltaire, t. XCIV, 1972, p. 17-23. – Gason P.-M., «Théorie et pratiques poétiques à Liège en 1778: l'hommage de Saint-Péravi à Voltaire et Rousseau», Etudes sur le XVIIIe siècle, t. VI, Bruxelles, 1979, p. 63-75.

Date indexée

1781
1782
1783
1784